Rôles et Légendes
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 Légendes de 11 à 20

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Rhadamante

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MessageSujet: Légendes de 11 à 20   Légendes de 11 à 20 Icon_minitime2/2/2007, 09:40

Le Dragon puni par le Phoenix

PARTIE I

Le Roi Dragon s'occupe principalement des pluies. Quand il fait tomber la pluie, il y a de l'eau sur la terre; s'il ne le faisait pas, les êtres vivants en souffriraient beaucoup.

On dit que dans l'Antiquité le Roi Dragon Luyibashida était très despotique. Il interdisait souvent à la Déesse des Pluies de travailler, si bien que les sources, puits et cavernes de la terre n'avaient pas d'eau, les champs se fendillaient de sécheresse, et les êtres vivants mouraient de soif.

Les êtres humains haïssaient tellement ce Dragon que le ciel en fut informé. Les immortels célestes discutèrent ensemble pour sauver l'Humanité. Un immortel nommé Qiangladuji dit:
- Laissez-moi arranger cette affaire, je connais un moyen pour sauver l'Humanité.

Déguisé en serviteur, Qiangladuji arriva chez Luyibashida. Il y travailla laborieusement et le Roi Dragon l'apprécia beaucoup. Un jour, trouvant que le moment était venu, il dit:
- Votre majesté le Roi Dragon, votre famille est la plus riche au monde. Il n'y a pas d'autre famille aussi riche et aussi prospère que la vôtre. Vous avez tout et ne manquez de rien Votre réputation est telle que les montagnes baissent la tête devant vous. Pourtant, il y a encore une chose que votre famille ne possède pas.

- Laquelle? dit le Dragon en levant haut sa tête orgueilleuse. Je possède tout!

- Vous savez déjà, chuchota Qiangladuji mystérieusement, que le Phoenix est la créature la plus noble au monde et ses oeufs la chose la plus précieuse. Ce qui vous manque, c'est un oeuf de Phoenix.

Le Roi Dragon changea vite d'attitude et dit avec des signes de tête:
- Eh bien, où peut-on trouver cet objet précieux? Pourrais-tu m'en trouver un?

- Ce n'est pas difficile, si vous le désirez, dit Qiangladuji, je peux certainement vous en trouver un.

Sortant alors du Palais royal, il monta au ciel et vit trois oeufs brillants dans le nid d'un Phoenix sur l'arbre divin. Juste à ce moment, le Phoenix qui couvait les oeufs était sorti chercher de la nourriture, alors il vola en cachette un oeuf, et repartit le donner au Dragon. En possession de l'oeuf multicolore de Phoenix, celui-ci rayonnait de joie.

Alors, Qiangladuji lui dit:
- Mon roi respecté, vous êtes vraiment maintenant le plus riche du monde, vous possédez tout et rien ne vous manque plus. J'ai fait ce que je devais faire, je vais rentrer.

De retour au ciel, Qiangladuji discuta encore un instant avec les immortels Zhongbuya et Qingliennijiang, puis il attendit le retour du Phoenix pour discuter comment punir le Roi Dragon.

PARTIE II

En rentrant à son nid, le Phoenix s'aperçut qu'un oeuf avait disparu, et il se mit à le chercher partout, en volant 90 000 lis à l'est, 90 000 lis à l'ouest, mais sans parvenir à retrouver son oeuf. Fou de colère, il allait et venait dans tous les sens du ciel, en monologuant:
- Mon nid est sur l'arbre divin, dont les branches soutiennent les neuf cieux, aucun animal au monde ne peut y être monté, personne ne peut avoir volé mon oeuf! Qui me l'a volé ?

C'est alors que Qiangladuji s'approcha et demanda:
- Noble Phoenix, pourquoi voles-tu ainsi dans tous les sens ? Qu'est-ce que tu cherches ?

- J'ai perdu un oeuf, dit le Phoenix, sais-tu qui me l'a volé ?

- Eh bien, je sais qui a volé ton oeuf, dit Qiangladuji avec des signes de tête. Mais je ne peux te le rapporter. Si tu veux, tu peux venir au Palais céleste discuter un peu avec nous.

Le Phoenix se hâta de le suivre au Palais céleste. Les immortels qui y attendaient demandèrent à la vue du Phoenix:
- Oh, Phoenix, tu as des ailes qui peuvent couvrir le ciel et des pattes à griffe comme l'éclair, peux-tu aller chercher le Roi Dragon Luyibashida dans l'eau ? Oserais-tu le faire ?

- Rien de plus facile, répondit le Phoenix. Mais pourquoi dois-je le tirer de l'eau ? Je ne veux que savoir qui a volé mon oeuf.

- Tire le Roi Dragon Luyibashida de l'eau, dirent les immortels, c'est lui qui a volé ton oeuf.

Quand il entendit cela, les pattes du Phoenix tremblèrent de colère: Il voulut tout de suite aller régler son compte au Dragon. Mais les immortels l'arrêtèrent en disant :
- Si tu tires tout son corps de l'eau, les hommes mourront. Il suffit que tu traînes sa tête ici, et nous aurons alors le moyen de lui faire rendre ton oeuf.

En agitant ses ailes, le Phoenix vola au 81e étage du ciel, puis il replia ses ailes et se laissa tomber droit dans la mer.

PARTIE III

D'un coup, la mer se fendit et apparurent le Palais et le Roi Dragon au fond de la mer. C'est alors que le Phoenix saisit le Dragon par le cou avec ses griffes et tira sa tête de l'eau, tout en lui demandant en colère:
- Quelle est la longueur de ton corps ?

Troublé par cette brusque attaque, le Dragon répondit vite:
- Mon corps est très long, tu n'en as sorti qu'à peine une moitié.

A ces mots, le Phoenix continua de monter, jusque devant les immortels. Et tout en tenant solidement le cou du Dragon, il cria:
- Tu es très malhonnête, pourquoi as-tu volé mon oeuf ? Si tu me rends mon oeuf, je te ferai grâce. Sinon tu verras !

Le cou serré par le Phoenix, le Dragon ne pouvait parler et il présenta des excuses avec des signes de tête. Les immortels dirent en le montrant du doigt:
- Luyibashida, alors que tu es le Roi Dragon, tu interdis à la Déesse des Pluies de faire pleuvoir, si bien que les champs se fendent, les plantes meurent, les êtres humains et les animaux ne peuvent vivre. Tu ne fais pas ce que tu dois faire, mais tu voles en cachette l'oeuf du Phoenix, si bien que le ciel et tous les êtres vivants te haïssent! Maintenant, nous te demandons si tu vas rendre son oeuf au Phoenix ?

- Je vais le rendre, je vais le rendre! acquiesça le Dragon de la tête.

- Feras-tu tomber les pluies ?

- Je le ferai, je le ferai!

- Alors, à ton retour, envoie ton serviteur rendre son oeuf au Phoenix, envoie la Déesse faire vite tomber la pluie pour que toutes les sources, tous les puits et toutes les cavernes aient de l'eau, que les cultures poussent, que l'Humanité ait de quoi manger et que tous les êtres vivent bien. Vas-tu le faire ?

- Oui, oui!

- Si tu le fais, l'Humanité te respectera, te priera et t'offrira chaque année des offrandes et des sacrifices.

Puis ils dirent au Phoenix de replacer doucement le Dragon dans la mer. Mais Qiangladuji s'approcha du Phoenix et lui chuchota:
- Saisis-le de toutes tes forces et fais-le tomber brutalement.

Le Phoenix agit selon le conseil de Qiangladuji, il lâcha le Dragon si énergiquement que les eaux de la mer jaillirent en de hautes colonnes, qui devinrent des milliers et des milliers de gouttes et volèrent aux alentours. En tombant sur la terre, les grandes gouttes devinrent de grands fleuves et rivières, les petites devinrent des sources, puits et cavernes.

Depuis lors, le peuple Pumi respecte le Roi Dragon selon les directives des Immortels et fait des offrandes chaque année aux fleuves, rivières, lacs, sources, puits et cavernes, pour prier le Roi Dragon de donner une bonne vie à la population Pumi. Après avoir été puni par le Phoenix, le Dragon n'a plus osé commettre de méfaits.
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MessageSujet: Re: Légendes de 11 à 20   Légendes de 11 à 20 Icon_minitime2/2/2007, 09:49

Plusieurs Dragons ne s'occupent pas bien des Eaux

PARTIE I

"Plusieurs Dragons ne s'occupent pas bien des Eaux." Ce dicton est bien connu en Chine. Pourquoi? Il y a naturellement une raison.

Il fut un temps où des mers immenses couvraient toute la terre. Et là-dedans pas un moment de paix! Car Dragons, tortues, trionyx, poissons, crevettes, ainsi qu'otaries, phoques et hippocampes, tous se disputaient se battaient et s'entretuaient pour devenir rois des mers, si bien que les vagues déferlaient impétueusement.

Dans ces mêlées et ces combats, les carapaces des tortues et des trionyx furent brisées; le corps des crabes aplati; les quatre longues pattes des hippocampes, coupées; les barbes des crevettes, presque toutes arrachées, et les autres animaux des mers subirent aussi des blessures.

Seuls quatre Dragons furent victorieux, et devinrent respectivement rois-Dragons des mers Orientale, Méridionnale, Occidentale et Nordique.

Longtemps après, les continents se formèrent, suivis beaucoup plus tard de l'apparition des êtres humains qui développèrent l'agriculture pour manger à leur faim.

Depuis lors, l'aspect des continents s'améliora de plus en plus. mais on avait besoin de pluie pour cultiver les terres. C'est alors que l'Empereur Céleste de Jade envoya les quatre rois-Dragons s'occuper des pluies dans le monde. Pourtant, ils se soustrayaient tous à leur obligation, et sans prendre à coeur leur mission de faire tomber les pluies, ils ne pensaient qu'à vivre dans la débauche.

Quand ils s'y ennuyaient, ils sortaient de leur Palais et faisaient des tours sur des nuages. Craignant que la poussière du monde ne salît leurs habits, ils faisaient tomber des pluies torrentielles pour laver la terre, tant et si bien que les rivières débordaient, que les champs étaient inondés, les terres rendues stériles, les maisons détruites, et beaucoup d'êtres humains et d'animaux étaient décimés.

Quelle misère dans le monde! Quelquefois, pendant deux ans, pas un Roi Dragon ne sortait de la mer alors sans pluie, ni récolte, nombreux étaient les gens qui mouraient de faim!

Plus tard, ayant appris que c'étaient les quatre rois Dragons qui étaient spécialement chargés de s'occuper des pluies, la population se mit à prier ceux-ci lors des sécheresses et des inondations, en leur sacrifiant des coqs, des porcs, des moutons, du bon vin, de la bonne nourriture, et même des enfants!

PARTIE II

Les quatre Rois Dragons ne s'en disputèrent que davantage, chacun voulant jouir seul des offrandes et des sacrifices!

- C'est moi qui ait fait tomber la pluie la fois dernière, disait l'un. C'est pour me revaloir cela que le monde humain offre des sacrifices, ils me reviennent donc!

- La fois dernière, disait l'autre, je suis sorti de mon Palais et j'ai fait seulement un petit tour au-dessus de la mer, sans faire tomber la pluie. De peur de la sécheresse, le monde humain m'a adressé des prières. C'est moi qui ai causé cette sécheresse, c'est à moi que reviennent ces sacrifices.

- La fois dernière, disait le troisième, quand je suis sorti de la mer pour faire un tour, j'ai vu dans le monde beaucoup de poussière, qui m'empêchait de bien voir. Fâché, j'ai fait tomber des pluies torrentielles pendant quarante neuf jours. C'est pour me remercier de mon bienfait que le monde humain fait des sacrifices.

- En tout cas, disait le quatrième, moi seul ai le droit de recevoir prières et sacrifices de la population, car pendant trois ans, je suis rarement sorti de la mer, et quand je m'ennuyais dans mon Palais, je buvais du vin de corail avec mes demoiselles d'honneur. Je n'ai pas causé d'inondations ni de sécheresses au monde humain. Je n'ai pas non plus troublé sa sécurité. Mes bienfaits pour lui sont donc évidents. A qui offre-t-il ces sacrifices?

Comme les quatre Rois Dragons se disputaient, il y avait souvent, dans le monde, des sécheresses et des inondations.

A cette nouvelle, le dieu Vénus adressa un rapport à l'Empereur Céleste de Jade:
- Voyez, Son Excellence, plusieurs Dragons ne s'occupent pas bien des eaux! Il vaut mieux charger les seuls Dragons des mers Orientale, Méridionale et Occidentale de cette tâche!

l'Empereur Céleste de Jade fut d'accord et donna une directive sacrée.

Tout comme on dit: "Un moine porte de l'eau à la palanche, deux moines portent de l'eau chacun à un bout de la palanche, et trois moines n'auront plus d'eau à boire." Trois Dragons, l'un attendant toujours que les deux autres fassent le travail, n'obtenaient pas le moindre résultat...

PARTIE III

Le dieu Vénus rapporta alors:
- Comme les trois Dragons attendent chacun que les autres fassent le travail, il vaut mieux charger les seuls Dragons des mers Orientale et Méridionale de s'occuper des eaux.

l'Empereur Céleste de Jade acquiesça encore et lança immédiatement l'ordre sacré.

Mais les deux Dragons continuant à attendre chacun que l'autre fasse le travail à sa place, ne cessaient de causer des calamités au monde.

Le dieu Vénus rapporta un fois encore:
- Deux Dragons se dérobent encore à leur obligation, il faut laisser au seul Dragon de la mer Orientale le soin d'administrer les eaux!

l'Empereur Céleste de Jade, encore plus séduit par cette idée, se hâta de donner un ordre sacré.

Quant il reçut cet ordre, le Dragon de la mer Orientale se précipita au Palais céleste et adressa une requête à l'Empereur Céleste de Jade:
- Quatre grands Dragons sont rois des mers, pourquoi me chargez-vous seul de m'occuper des pluies dans le monde?

l'Empereur Céleste de Jade expliqua:
- Ce qui s'est passé auparavant m'a fait comprendre que quatre Dragons n'administrent pas bien les eaux; que trois Dragons se soustraient à leur obligation, et que deux Dragons s'attendent l'un l'autre dans le travail. Au contraire, si l'on charge un seul Dragon de s'occuper des eaux, il a une mission spéciale et claire et cela va marcher. Aux trois autres Dragons, je vais donner d'autres ordres.

Le Dragon de la mer Orientale continuait à importuner l'Empereur Céleste de Jade pour être déchargé de sa responsabilité de s'occuper des eaux. Celui-ci se mit en colère et s'écria:
- Si tu ne t'occupes pas bien des eaux, je supprimerai ta dignité royale et te rabaisserai au rang de crevette! Tu verras!

Dès lors, de peur d'être dégradé, le Dragon de la mer Orientale s'occupa avec soin des eaux. C'est pourquoi pendant de longues années, il y eut des vents et des pluies propices et bienfaisants. Ainsi, le monde humain connut de bonnes récoltes.

"Plusieurs Dragons n'administrent pas bien les Eaux."
Ce dicton se répandit de génération en génération. Aujourd'hui encore, cette chanson est encore largement répandue.

Un Dragon s'occupe des Eaux,
Les vents et les pluies sont propices;
Deux Dragons s'occupent des Eaux,
Il y a des sécheresses ou des inondations;
Trois Dragons s'occupent des eaux,
L'un comme les autres se dérobent à l'Obligation;
Quatre Dragons administrent les Eaux,
Il n'y a certainement rien à récolter.
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MessageSujet: Re: Légendes de 11 à 20   Légendes de 11 à 20 Icon_minitime2/2/2007, 09:50

La Fille Dragon Meidan

PARTIE I

A l'ouest du bourg de Xuanping, dans le district de Wuyi, se dresse une montagne nommée le mont des Cinq Dragons, sur laquelle poussent des bambous fins et des bois denses, des herbes sauvages et des fleurs parfumées; des sentiers la parcourent en zigzag; dans les vallées, l'eau des sources coule vers le ruisseau Hu. Pourtant, au sommet des Cinq Cimes, il ne pousse aucun bois ou bambou, seule une couche de verveine officinale s'y étale, verte au printemps et en été, jaune en automne et en hiver.

Chose curieuse: Une des cimes nommée Meidan au centre est si haute qu'elle a l'air de vouloir percer le ciel. Un proverbe dit:

"Si Meidan porte un manteau blanc, il pleuvra dans la journée;
si elle se coiffe d'un chapeau de nuages immaculés, il fera sec et beau."

Pourquoi la cime Meidan se pare-t-elle toujours de vêtements blancs?

En voici l'histoire...

Dans l'antiquité, cet endroit était un lac nommé lac des Eaux Blanches. Chaque année, le jour où commençait l'été, l'eau de ce lac montait si violemment que les inondations détruisaient les champs fertiles et noyaient beaucoup de gens et d'animaux domestiques.

En automne et en hiver au contraire, il n'y avait pas là une seule goutte d'eau, et le fond du lac était si sec qu'il se fendait. Pour arroser les légumes, on devait aller chercher de l'eau en des endroits très éloignés. Eprouvant une haine mortelle pour ce lac, le peuple priait le ciel de le remblayer.

Sur la rive orientale du lac, vivait une jeune fille nommée Meidan. Un jour, comme ses parents avaient été emportés par les inondations, elle fit des centaines d'allers et retours autour du lac, mais sans jamais pouvoir retrouver leurs cadavres.

Le coeur brisé, elle tomba assise par terre, et très affligée, pleura à gros sanglots, le visage dans les mains.

Soudain, elle entendit un cri de douleur. Levant la tête, elle vit un loup qui avait saisi dans sa gueule la patte arrière d'un petit daim. Elle cria d'horreur. Effrayé, le loup lâcha prise et s'enfuit. Meidan pansa avec de l'étoffe la patte du petit animal et lui dit:
- Rentre chez toi auprès de tes parents!

Le daim allongea un peu ses pattes et se mit à parler:
- Tu m'as sauvé la vie, alors si tu as des difficultés, va au bord de la mer Orientale et cherche un figuier banian millénaire à quatre branches; il te suffira de frapper trois fois son tronc avec la main et d'appeler trois fois en direction de la mer: "Dragon noir".

PARTIE II

Le premier jour de l'été allait arriver , les villageois apeurés se préparaient à fuir les calamités. A ce moment là, les paroles du petit daim revinrent à l'esprit de la jeune fille Meidan.

Courant alors au bord de la mer Orientale, elle trouva en effet un figuier banian millénaire à quatre branches. Elle frappa trois fois le tronc, et cria en direction de la mer:
-Dragon noir! Dragon noir! Dragon noir!

A ces trois cris, un beau garçon se dressa hors de l'eau et lui fit signe de la main. Elle vit l'eau de la mer s'ouvrir en un chemin vert. A peine fut-elle descendue sur le chemin qu'un coup de vent léger la fit voler.

Un instant après, elle tomba devant la porte d'un Palais splendide; le Roi Dragon et ses quatre fils l'accueillirent, debout sur le perron. Dragon noir lui prit la main et la conduisit dans le Palais. Le Roi Dragon lui dit:
-Fille Meidan, tu as sauvé mon fils cadet Dragon noir, tu es le sauveur de notre famille. Quoi que tu désires, tu n'as qu'à me le dire, je te le donnerai.

- Je n'ai ni parents, ni frères, ni soeur, dit-elle, je viens seulement pour...

- C'est facile! rayonnant de joie, le Roi Dragon lui coupa la parole. Si tu veux, je te prends pour fille adoptive, tu auras ainsi des parents, frères et soeurs!

Tout de suite, le Roi Dragon fit venir la reine, ses fils et ses filles pour les présenter à Meidan. Il prit un verre de vin et but un peu, puis passa le verre à la reine, à ses fils et filles, pour qu'ils en boivent un peu, enfin à Meidan qui finit le verre. C'est ainsi que Meidan devint fille adoptive du Roi Dragon.

Meidan, qui menait une bonne vie dans le Palais, oubliait peu à peu le monde humain. Un jour, alors qu'elle jouait avec ses frères et soeurs dans la mer, elle vit un grand poisson avec une jambe humaine dans la gueule et ne put s'empêcher de demander:
- D'où vient cette jambe humaine?

- Elle vient du lac des Eaux Blanches, lui répondit Dragon noir. A leur arrivée ici, les cadavres des êtres humains noyés par les inondations ne sont plus entiers.

Sous le coup de la stupéfaction, le souvenir des inondations lui revint. Meidan éclata en sanglots, et les consolations de ses frères et soeurs ne réussirent pas à la calmer. Enfin, Dragon noir dit en prenant les mains de la jeune fille qui couvraient son visage:
- Soeur, dis-nous ce que tu as sur le coeur, nous t'aiderons.

PARTIE III

Affligée, Meidan, en essuyant ses larmes, leur raconta que les inondations causées chaque année par le lac des Eaux Blanches avaient détruit les champs et noyé ses parents et beaucoup de villageois, ainsi que les animaux domestiques. Elle demanda à ses frères et soeurs de boire toute l'eau du lac et de le combler avec des pierres.

A ces paroles, les frères et soeurs de Dragon noir, croyant que ce serait très facile à faire, allèrent demander au Roi Dragon. Mais celui-ci ne fut pas d'accord et dit:
- L'eau du lac des Eaux Blanches est préparée pour l'étang de Jade de la Reine Mère céleste. Chaque année, le jour où commence l'été, la Reine Mère envoie des divins verser de l'eau dans le lac pour le laver, puis on va y puiser de l'eau propre chaque jour, et à l'automne, toute l'eau est transportée dans l'étang de Jade. Si vous buvez l'eau et comblez le lac avec des pierres, vous violerez la loi céleste!

En aucune façon, le Roi Dragon ne voulait donner sa permission. Meidan rentra dans sa chambre et pleura à chaudes larmes.

Voyant que Meidan avait le coeur navré, Dragon noir alla discuter avec ses frères aînés. Les frères vinrent dans la chambre de Meidan et dirent:
- La Reine Mère nuit toujours aux êtres humains, nous devons aller les sauver sans tenir compte de la loi céleste. Demain, nous nous lèverons très tôt pour y aller, et après avoir comblé le lac, nous reviendrons vite.

Le lendemain, à l'aube, Meidan et les quatre frères arrivèrent dans la région du lac. C'était juste le jour du commencement de l'été, l'eau dans le lac était montée très haut; et riverains, vieillards et enfants, femmes et hommes avaient dû se sauver vers des endroits élevés en conduisant les bêtes.

Voyant cela, Meidan cria à haute voix:
- Oncles, tantes et belles-soeurs, nous sommes venus pour combler le lac des Eaux Blanches!

PARTIE IV

Levant la tête, les villageois virent Meidan et quatre Dragons arriver en volant, et les accueillirent avec joie. Les quatre Dragons déployèrent leurs talents et burent toute l'eau.

Un instant après, le fond du lac apparut. Puis ils apportèrent des pierres des montagnes lointaines et les jettèrent dans le lac. Mais, une fois tombées dans le lac, les pierres devinrent de la boue. Les villageois apportèrent alors des vases de nuit et versèrent l'urine sur la boue.

L'eau magique perdit de ce fait ses propriétés et les pierres réapparurent. Pourtant, juste au moment où Meidan et ses frères s'affairaient, le dieu de la Montagne alla rapporter l'affaire à l'Empereur Céleste de Jade.

La Reine Mère, bouillant de colère, envoya des dieux les arrêter. Mais à leur arrivée, le lac était déjà comblé. Alors ils lancèrent 36 épées vers Meidan et les quatre frères et les tuèrent. D'un saut, Meidan serra les frères dans ses bras pour qu'ils ne tombassent pas. Peu à peu, ils se transformèrent en une montagne.

Plus tard, on y édifia un Palais magnifique de Cinq Dragons où l'on offrait des prières et des sacrifices quotidiens. On ne construisit plus dans cette région de temple ni à l'intention des dieux, ni de l'Empereur Céleste de Jade ni de la Reine Mère.

Sur ce mont des cinq Dragons, la cime Meidan est la plus haute. Bien qu'ils aient été battus par la Reine Mère, ils ne sont pas morts. Voyez, au printemps et en été, quand il pleut beaucoup, ils attirent l'eau au sommet du mont pour que les herbes y soient verdoyantes; en automne et en hiver, quand il pleut peu et qu'on a besoin d'eau pour arroser les légumes, ils font tomber l'eau au pied du mont, et les herbes du sommet se dessèchent.

Quant à Meidan, qui dresse haut sa tête dans les nuages, elle porte des habits blancs, quand elle voit qu'il pleuvra, et se coiffe d'une couche de nuages, quand il va faire beau. Peu à peu, on se mit à appeler cette cime "la Fille Dragon Meidan".
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MessageSujet: Re: Légendes de 11 à 20   Légendes de 11 à 20 Icon_minitime2/2/2007, 09:51

La Légende du Dragon Blanc

PARTIE I

Du côté de la Porte ouest de la ville de Zhenjiang, se dresse une montagne appelée mont du Dragon Blanc. Tous les jours , à minuit, raconte-t-on des nuages tout noirs s'amoncellent d'est en ouest autour de la montagne pour se disperser à l'aube dans le sens inverse. Une légende explique ce curieux phénomène:

Autrefois, cette montagne ne portait pas ce nom de Dragon Blanc, elle s'appelait Changshan. C'était une grande montagne qui se dressait entourée de nuages dans le ciel , couverte de toutes sortes de fleurs et de plantes; il y vivait, près d'une dense forêt de pins et de cyprès, un caméléon géant.

Celui-ci, après s'être pendant quelques millénaires exercé à la pratique de la perfection, se transforma en un Dragon terrestre, capable de se métamorphoser en une jolie fille toujours vêtue de blanc, d'où le nom actuel de la montagne.

Le troisième jour de la troisième lune est l'anniversaire de la Reine Mère céleste, et à cette occasion tous les dieux et Déesses sont invités à déguster dans le Palais céleste du vin et des pêches. Cette année-là, le Dragon Blanc, promu Déesse terrestre, eut l'honneur d'être invité. Il rencontra en chemin le troisième Prince du Dragon Aoguang, roi de la mer Orientale. Jeunes tous deux, ils lièrent vite conversation:
- Où allez-vous?

- A l'anniversaire de la Reine Mère céleste.

- Où est-ce que vous habitez?

-Sur le mont Changshan, et vous?

- Dans la mer orientale.

Ils bavardèrent ainsi tout le long du chemin, parfois en plaisantant. Leur familiarité s'accrut à mesure que s'approfondit la conversation. Au moment de de quitter, le Prince de la mer dit à son compagnon:
- Puis-je te rendre visite demain?

- Je ne demande pas mieux.

PARTIE II

Le lendemain, de très bonne heure, le Prince sur un nuage, arriva au rendez-vous. Changés l'un en beau jeune homme, l'autre en une jolie fille, ils tombèrent très vite amoureux l'un de l'autre.

Leur amour ayant grandi avec le temps, ils en vinrent à échanger des voeux de fidélité éternelle et à espérer se marier au plus vite.

Or, l'alliance entre dieux terrestre, océanique et céleste était proscrite par la cour céleste. Il se trouvait que le Prince de la mer, s'il était privé d'eau, courait le risque de perdre la vie. C'est pourquoi, à chaque fois qu'il se rendait chez sa bien-aimée, les environs du mont Changshan se couvraient de pluie et de vent.

l'Empereur Céleste de Jade finit par être informé de ces intempéries et il envoya le dieu de Vénus en rechercher la cause. Lorsqu'il sut que le fils du roi de la mer Orientale entretenait des relations amoureuses avec le Dragon Blanc, il fut pris de fureur et convoqua le père, auquel il administra une dure réprimande.

Le père ainsi admonesté ne tarda pas à emprisonner son fils insolent. Mais comme dit le dicton, le corps peut bien être enfermé, mais non le coeur. Mis en quarantaine, il n'en restait pas moins amoureux de sa bien aimée. C'était la même chose pour elle. Ils finirent par s'étioler tous les deux à force de penser l'un à l'autre.

Le roi de la mer Orientale, père de l'écroué, voyant que l'emprisonnement ne suffisait pas à faire changer d'idée à son fils, prit le parti de s'y prendre autrement. Il le fit entourer d'un bon nombre de Déesses océaniques plus belles les unes que les autres. Mais le Prince, fidèle, demeurait de glace, suppliant qu'on lui accorde la liberté de choisir son épouse.

Le père, saisi d'une colère impuissante, finit par dire:
- L'eau et la montagne étant incompatibles, te marier avec le Dragon Blanc, Déesse terrestre, constituerait une transgression des lois céleste. La punition n'atteindra pas que toi, toute la famille court le risque d'être condamnée à la peine de mort. Toutefois, je puis t'autoriser à lui rendre visite entre dix heures du soir et cinq heures du matin mais à condition de n'emporter ni vent ni pluie.

Se déplacer sans pluie ni vent était pour lui chose impossible. L'autorisation de son père ne visait qu'à lui montrer l'impossibilité de sa demande, le jeune Prince, n'ayant d'amour que pour elle, s'affola encore plus. Il finit par tomber malade.

PARTIE III

Un jour, allongé dans son Palais de cristal, tourné du côté de la montagne, il poussa un long soupir.

A ce moment un coq à cinq couleurs apparut d'un pas léger. Il se dirigea vers le Prince et lui dit gentiment:
- Cher Prince, ne vous tracassez pas. Vous n'avez qu'àm'emporter dans votre voyage et je vous signalerai l'heure du départ et du retour. Votre père ne pourra rien faire.

Attendri par ce geste d'amitié, le Prince se sentit tout à coup à moitié remis de sa maladie. Il dit en caressant les plumes du coq:
- Mon cher ami coq, il n'y a que toi qui me comprennes.

Puis il se retourna du côté de la montagne et soupira de nouveau à l'idée de l'impossibilité, en dépit du concours du coq, de se déplacer sans vent ni pluie.

Un cheval accourut et lui dit:
- Cher Prince, ne vous angoissez pas trop. Je vous transporterai volontiers chez le Dragon Blanc. Votre père ne pourra rien faire.

A ces propos, le Prince de nouveau se sentit beaucoup mieux. Il caressa la robe du cheval en disant:
- Mon cher ami, mon père ne sait point où est attaché le coeur de son fils. Toi, tu es bien mon ami intime. Le lendemain, avant l'aube, le Prince monta secrètement sur le cheval portant le coq dans les bras et se dirigea vers la montagne. Alors, des nuages ténébreux, d'est en ouest, entourèrent la montagne. Arrivé chez sa bien-aimée, il attacha le cheval à un grand pin et déposa le coq sur un monticule près de la montagne.

PARTIE IV

Après trois ans de séparation, ils étaient émus jusqu'aux larmes l'un et l'autre de se revoir et avaient mille et une chose à se raconter. Mais bientôt à l'approche de l'heure du retour, le coq lança son signal. Le Prince, à contrecoeur, reprit le coq et regagna à cheval son Palais.

A partir de ce jour, les deux amoureux se retrouvèrent, quoiqu'en catimini, pour leur rendez-vous quotidien. Mais le père, soupçonneux, finit par s'apercevoir que son fils, bizarrement, ne parlait plus de choisir une épouse. Il se mit à le surveiller.

Comme tous les jours, le Prince s'apprêta à se rendre à son rendez-vous avec le concours du coq et du cheval. Son père le suivit de loin et vit son fils embrasser sa bien-aimée.

Emporté de fureur, il lui envoya un coup brutal et fit tomber la cage du coq dans la vallée, actuelle vallée de la Cage du coq. Puis il sortit son épée et décapita le cheval, dont il ne resta plus que la forme d'une selle, d'où le nom de la Montagne de la Selle.

Le Mont Changshan, lui aussi, changea de nom, c'est l'actuelle Montagne du Dragon Blanc. Deux vers se répandirent peu à peu:

A l'est du Dragon Blanc, la Cage du Coq,
A l'est de la Cage, la Montagne de la Selle.

Les nuages ténébreux qui se déplacent toutes les nuits aux environs de la montagne du Dragon Blanc, sont, dit-on, l'incarnation du cheval décapité qui transporte le Prince amoureux à son rendez-vous quotidien avec la Déesse adorée.

Mais qu'est-il donc advenu du coq?

Il a été jeté dans la vallée mais, si l'on prête bien l'oreille, on peut encore l'entendre chanter.
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MessageSujet: Re: Légendes de 11 à 20   Légendes de 11 à 20 Icon_minitime2/2/2007, 09:51

Le Dragon qui se nommait Vieux-Li-Sans Queue


PARTIE I

Le fleuve du Dragon Noir ne porte son nom actuel que depuis que Vieux-Li-sans-queue s'y est installé. A l'origine, ce n'était pas un Dragon Noir qui y vivait, mais un Dragon blanc féroce, qui s'attaquait aux gens et provoquait souvent des inondations.

Vieux-Li-Sans Queue était originaire du destrict de Yie au Shandong. Dès le matin du jour de sa naissance, le ciel se couvrit de nuages et il souffla un grand vent bizarre, qui fut suivi d'une averse. La pluie tombait si dru que la vue en était obstruée. C'est par un temps si détestable que Vieux-Li-Sans Queue était venu au monde.

Sa mère allaitait son nouveau né, mais à chaque fois, elle s'évanouissait de douleur. Son père, qui avait déjà beaucoup de mal à subvenir aux besoins de la famille, se faisait encore plus de souci maintenant qu'il avait trois bouches à nourrir.

Aussi, dès qu'il vit ce monstre tout noir à son retour des champs, il lui flanqua un coup de bêche sur la queue, d'où le nom de Vieux-Li-Sans Queue. Dans sa douleur, le malheureux sauta en l'air, traversa le toit dans un roulement de tonnerre, se précipita vers le nord-est dans une traînée de feu et descendit dans le fleuve du Dragon Noir.

Etant originaire du Shandong, Vieux-Li-Sans Queue avait beaucoup de sympathie pour les gens de son pays natal. On dit que pour naviguer sur le fleuve du Dragon Noir, il faut d'abord demander:
- "Y a-t-il quelqu'un du Shandong?" et il suffit de répondre "oui!" même s'il n'y en a pas en réalité, le bateau est à l'abri de tout accident.

C'est pour cela que depuis de nombreuses années, aucun navire n'a coulé dans le fleuve du Dragon Noir, car c'est là que vit Vieux-Li-Sans Queue. Comme il est très bon avec les gens du Shandong, il jouit d'une très bonne réputation parmi eux.

PARTIE II

Vieux-Li-Sans Queue revient toujours dans son pays natal le 13e jour de la 5e lune de chaque année, jour anniversaire de la mort de sa mère, pour se prosterner devant la sépulture de celle-ci. Le jour où il rentre, il pleut toujours. Les habitants du Shandong ont l'habitude de dire:
- Même après trois ans de sécheresse, on n'oublie pas le 13e jour de la 5e lune. Ce jour-là, même s'il fait beau, on se garde de faire sécher les vêtements, car c'est le jour où Vieux-Li-Sans Queue revient ajouter de la terre sur la tombe de sa mère. Souvent, à cette occasion, Vieux-Li-Sans Queue n'oublie pas d'offrir aux villageois des spécialités du fleuve du Dragon Noir, aussi compte-t-on beaucoup sur ce jour où le vent et la pluie leur apportent quelque chose de très particulier.

Ce n'est cependant pas sans difficulté que Vieux-Li-Sans Queue s'était installé dans le fleuve du Dragon Noir.

A l'époque, sur les deux rives du fleuve du Dragon Noir s'étendaient de vastes friches presque inhabitées à cause des inondations continuelles. Là, vivait un vieux défricheur. Un jour, il vit venir un jeune homme très noir qui lui demanda de l'héberger pour la nuit. Le lendemain le gars lui dit:
- Vieux père, je suis sans feu ni lieu, j'ai envie de me réfugier chez vous, êtes-vous d'accord?

- Pourquoi pas? répondit le vieux, fais comme tu veux, il y a suffisamment de quoi manger pour toi. Travaille un peu quand tu en auras envie, et repose-toi quand ça ne te dira rien.

C'est ainsi quele jeune homme s'établit là. Les premiers jours, il aida le vieux à couper du bois et à faire le ménage, puis il prépara les repas pour le vieux qui s'occupait des champs. Ils vécurent ainsi en bon termes pendant assez longtemps.

PARTIE III

Un jour, à midi, le vieux revint des champs, harassé de fatigue.
- Eh bien, combien de terre avez-vous défriché? demanda le gars.

- Pas beaucoup, répondit le vieux, car il y a trop de racines d'arbres dans le sol.

- J'ai une idée, reprit le gars, j'en ai assez de rester toujours à la maison, que diriez-vous de rester faire la cuisine tandis que j'irais aux champs à votre place?

- Soit!

L'après-midi, ils firent comme convenu. Après le déjeuner, le vieux fit une longue sieste, qui dura jusqu'à la fin de l'après-midi. Désireux de savoir comment le jeune homme travaillait, il se rendit alors sur le lieu du travail.

Il n'était pas encore arrivé qu'il entendit le vent souffler et vit des arbres s'abattre sur le sol. De la poussière et des pierres dansaient dans le ciel. Le vieux fut surpris de voir que c'était un Dragon Noir qui travaillait là. Il déracinait les gros arbres de sa queue à moitié amputée, aussi facilement que s'ils avaient été des pousses de sorgho. Les arbres abattus s'entassaient jusqu'au ciel.

A cette vue, le vieux n'osa plus avancer, de peur d'être atteint par les pierres qui volaient en tout sens. Il retourna alors à la maison.

Le soir, après le retour du jeune homme, ils s'assirent pour dîner ensemble.

- Comment as-tu travaillé? demanda le vieux?

- Assez bien. Ces derniers jours, je commençais à m'ennuyer, à force de rester toujours à la maison, c'est pourquoi j'en ai mis un sacré coup!

- Mais ce que tu as fait est très fort!

- Comment! Vous m'avez vu?

- Oui, je suis allé te voir, mais je n'ai pas osé m'approcher, de crainte d'être tué par les volées de pierres et de morceaux de terre.

- Vieux père, dit le gars en riant, puisque vous m'avez vu, je ne peux plus rien vous cacher. Je vois que vous êtes très bon, je voudrais qu'on soit dorénavant amis intimes.

- Je veux bien.

- Vieux père, à vrai dire, j'ai envie de m'installer ici.

- Fais comme tu veux, je n'y vois pas d'inconvénient.

- Non, vieux père, vous n'avez pas compris, je veux dire m'installer dans le fleuve.

- Vas-y alors, personne ne t'en empêche.

- Cela ne va pas, dit le jeune homme en secouant la tête, il y a déjà quelqu'un dans le fleuve, et si je veux m'y installer, il faut que je me batte avec lui.

- Et bien vas-y.

- Mais il est plus fort que moi!

- Comment faire alors?

- Aidez-moi, vieux père!

- Mais comment pourrais-je t'aider, alors que je ne sais même pas nager?

PARTIE IV

- Vous n'avez pas à descendre dans le fleuve. Mon adversaire a une maison. Il peut rentrer manger chaud chez lui quand il a faim. Mais moi, je ne peux que boire de l'eau du fleuve pour tromper ma faim. Comment pourrais-je le vaincre? Voilà ce que vous allez faire pour m'aider: Le jour de notre combat, vous préparerez du pain et des pierres que vous entasserez au bord du fleuve. Quand vous verrez de la mousse noire et une main noire sortir de l'eau, vous jetterez des pains; et lorsque vous verrez de la mousse blanche et une main blanche, vous lancerez des pierres. Comme ça, vous me rendrez un grand service.

A ces mots, le vieillard dit:
- Pas difficile, compte sur moi.

Ceci dit, le gars lui précisa le nombre de pains et de pierres qu'il fallait préparer, l'endroit où les déposer et la distance à garder entre les tas de pains et de pierres. Dès lors, le vieux se mit à faire des préparatifs et le gars sortit tous les jours s'entraîner.

Le jour du combat arrivé, le gars descendit dans le fleuve. Ce jeune homme était en réalité Vieux-Li-Sans Queue. Aussitôt les eaux du fleuve se mirent à s'agiter. Les vagues se succédaient les unes aux autres, se brisaient contre les berges en faisant trembler les deux rives. Le vieillard observa attentivement le déferlement des eaux.

Peu après, de la mousse noire et une main noire sortirent de l'eau, et le vieillard jeta des pains. Un moment après, de la mousse blanche et une main blanche montèrent du fond du fleuve, aussitôt il lança des pierres. Le combat dura du matin jusqu'au soir et finalement Vieux-Li-Sans Queue vainquit le Dragon blanc.

Depuis que Vieux-Li-Sans Queue s'est installé dans le fleuve, les eaux sont devenues noires d'où son nom: Fleuve du Dragon Noir...

...Vieux-Li-Sans Queue est très bon! Lors de "l'incident du 18 septembre", (Le 18 septembre 1931, l'armée japonaise du Guandong attaqua la ville de Shenyang et commença à occuper les trois provinces du Nord-Est de la Chine.) il a même participé à la résistance contre les japonais. A ce moment-là, deux régiments de volontaires sur des bateaux étaient talonnés par les navires des agresseurs japonais. Tout à coup, surgit un petit canot conduit par un vieillard à la barbe noire.

- N'ayez pas peur, suivez-moi!

Ce disant, il sauta sur le bateau des combattants et ordonna:
- Démarrez!

En disant cela, il fit un signe de la main et un épais brouillard s'abattit sur le fleuve. Du coup, on ne voyait plus rien sur l'eau. Mais le bateau des volontaires sur lequel était le vieillard avançait à la vitesse d'une flèche.

C'est ainsi que les deux régiments de volontaires réussirent à s'échapper aux Japonais. Lorsque le brouillard se fut dissipé, le vieux à la barbe noire n'était plus là, on ne voyait plus sur le bord du bateau que deux gros caractères: "Vieux Li".
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MessageSujet: Re: Légendes de 11 à 20   Légendes de 11 à 20 Icon_minitime2/2/2007, 09:52

La Danse des Dragons


PARTIE I

L'Empereur Céleste de Jade fêtait son anniversaire, les immortels allèrent lui apporter leurs voeux. La fêtes dura trois jours et trois nuits. Le Dragon doré, ennuyé, sortit se distraire en dehors du Palais céleste. Soudain, il entendit des pleurs qui venaient de la terre. Il se métamorphosa en être humain, descendit sur la Terre et demanda ce qui se passait auprès d'une fillette en sanglots.

La fillette leva les yeux et vit devant elle un mignon garçon. Toujours éplorée, elle se plaignit:
- Depuis trois ans, pas une seule goutte d'eau n'est tombée. Les plantes ayant péri, nous voilà réduits à manger l'écorce des arbres.

Puis elle se remit à sangloter et conduisit le garçon près d'un trou creusé dans le sol. Montrant les traces de sang aux alentours du trou, elle expliqua:
- Pour que tout le monde au village puisse avoir de l'eau, mon grand-père a invité tous les habitants à utiliser le puits qui lui appartenait. Mais celui-ci ne contenait pas assez d'eau pour qu'ils en bénéficient indéfiniment. Mon grand-père s'est alors résolu à creuser d'autres puits. Il a travaillé sans répit nuit et jour, mais un mois s'est écoulé sans que la moindre trace d'eau n'aparaisse, quoiqu'il en eût déjà creusé à quelques dizaines de mètres au-dessous du sol. Accablé de soif, de faim et de fatigue, il a fini par rendre l'âme...

Entendant cela, le Dragon doré ne put retenir ses larmes. Et d'un coup de pied sur le sol, le voilà volatilisé qui s'en va vers le ciel.

A l'endroit où il avait donné le coup de pied, la fillette vit apparaître un étang d'eau avec l'empreinte des cinq doigts d'une patte au fond. Elle se hâta d'aller faire part de cela à tous les villageois qui, exultant, s'adressèrent au firmament en ces termes:
- Dragon divin, nous te sommes infiniment reconnaissants pour cet étang. Pourtant cette quantité n'est point suffisante pour que vivent les plantes et les humains. Mieux vaut donc faire pleuvoir à torrents.

Le Dragon doré, à ces appels, retourna dans le Palais les immortels ayant fait bonne chère, étaient partis les uns après les autres.

Il alla voir le Dragon souverain de la mer orientale, maître des pluies. Il lui fit part des plaintes des habitants de la Terre. Or ce dernier, à moitié ivre, répondit avec des hoquets:
- Sans l'ordre de Sa Majesté l'Empereur de Jade, je... je... je ne suis pas à même de commander les... pluies.

Le Dragon doré, sur le champ, décida de demander audience à l'Empereur suprême. Arrivé à sa demeure, il fut arrêté parles gardiens de la résidence de l'Empereur, qui lui en interdirent l'accès:
- Sa Majesté suprême a trop bu. Vous feriez mieux de revenir demain.

PARTIE II

Le visiteur ainsi rejeté se mit à réfléchir:
"Un jour passé au Ciel équivaut à une année sur la Terre; voilà trois ans que les villageois souffrent, comment puis-je laisser ce malheur se prolonger jusqu'à l'année prochaine?"

Il finit par trouver une solution. Il s'adressa au Maître du Tonnerre et à la Maîtresse de l'Eclair:
- Sire Tonnerre et Duchesse Eclair, ayez pitié de ces pauvres malheureux. Si vous ne pouvez faire tomber la pluie, vous êtes capables de faire éclater tonnerre et éclair. Puis il se présenta chez les propriétaires du Vent et des Nuages:
- Ayez pitié, mes chers amis, de ces pauvres malheureux. Si vous ne pouvez commander la pluie, vos nuages et vents les rafraîchiront. Faites-les apparaître, je vous en supplie, afin qu'ils en bénéficient.

Soudain, le vent se mit à souffler, les nuages à s'amonceler, le tonnerre à gronder et l'éclair à briller. A toutes jambes, le Dragon doré revint au Palais où habitait le souverain de la mer Orientale et lui cria droit dans les oreilles:

- Sa Majesté suprême t'ordonne de faire tomber des pluies, mais tu tardes à t'arracher du sommeil. Veux-tu te faire punir!

Celui-ci, toujours dans les vignes du Seigneur, entendant vent et tonnerre, prit la bouteille contenant la pluie et la versa sur la Terre.

Et les humains , depuis longtemps assoiffés sautèrent de joie au milieu des pluies, tant ils étaient reconnaissants au Dragon doré, leur sauveur!

La pluie avait à peine cessé que l'Empereur suprême s'enquit de l'événement. Il convoqua une assemblée des Immortels et, dans une fureur rare, il menaça de tuer le Dragon doré.

Tonnerre et Eclair, ayant pitié de l'accusé, implorèrent grâce pour lui auprès de l'Empereur en colère. Vent et Nuages, de concert, répandirent la nouvelle sur la Terre. Les humains, irrités, manifestèrent en faveur de leur sauveur, lançant des pétards et battant du tambour. Pris de peur, l'Empereur Céleste fit preuve de clémence: Le Dragon doré serait condamné à la vie terrestre et brûlé.

Les habitants d'ici-bas, trop bons pour infliger une telle peine au Dragon, eurent l'idée de remplacer le feu par de la poudre tassée dans un tube de bambou. La poudre en explosant, ferait jaillir des étincelles ressemblant à un incendie sans pour autant nuire au Dragon. Le Dragon doré s'en sortit ainsi sain et sauf.

Dorénavant, le 15 janvier lunaire, il est d'usage d'organiser des danses avec de petits Dragons de papier ou de bambou, fabriqués à l'image de leur sauveur vaillant, afin de rendre hommage à ce dernier pour son sacrifice et, en même temps, de partager avec lui leur joie des bonnes récoltes.
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MessageSujet: Re: Légendes de 11 à 20   Légendes de 11 à 20 Icon_minitime2/2/2007, 09:53

La Fille du Roi Dragon


PARTIE I

Lors de la période de Yifeng (676-678), un bachelier nommé Liu Yi, qui avait échoué à un examen officiel, décida de s'en retourner sur les bords de la rivière Xiang (province du Hunan). Comme il avait un compatriote qui restait à Jingyang (province du Shaanxi), il s'y rendit pour lui dire adieu.

A peine eut-il fait quelques kilomètres, que son cheval, ayant fait lever un essaim d'oiseaux, fit soudain un écart, partit ventre à terre, et ne s'arrêta qu'au bout de deux lieues. Là, il vit une femme qui menait paître des moutons non loin de la route.

En la regardant, il la trouva ravissante. Mais, ses sourcils finement arqués étaient froncés, ses manches rabattues, ses vêtements sans éclat, elle avait l'air morne et figée, comme si elle attendait quelqu'un.

- Qu'y a-t-il donc qui vous fasse tant de peine ? Lui demanda Liu.

D'abord, elle le remercia par un petit sourire, puis fondant en larmes lui répondit :

- Malheureuse que je suis ! Puisque vous daignez vous intéresser à la peine qui me pénètre jusqu'à la moelle des os, toute honteuse que je sois, je ne saurais garder le silence. Veuillez m'écouter; je suis la fille cadette du Roi Dragon du lac Dongting. Mes parents me firent épouser le second fils du Roi Dragon du fleuve Jing, mais mon mari, de nature volage, se laissant séduire par ses servantes, me maltraitait chaque jour davantage. Je m'en plaignis alors à mes beaux-parents, mais ils gâtaient trop leur fils pour prendre ma défense. Offensés par mes plaintes réitérées, ils m'ont exilée ici.

A ces mots, elle défaillit et éclata en sanglots.
- Le lac Dongting est si loin d'ici ! Reprit-elle. Seule, face au vaste horizon, comment faire parvenir un message ! J'ai le coeur brisé, et les yeux las d'attendre, mais personne ne connaît ma peine. Puisque vous partez pour le Sud et passerez tout près du lac Dongting, oserais-je vous confier une lettre ?

- Je suis un homme de coeur, répondit Liu. A votre récit, je sens mon sang bouillonner ! Point n'est besoin de chercher une réponse. Je ne demanderais que d'y voler, même sans ailes ! Mais le lac Dongting est si profond, moi qui ne marche que sur terre, comment pourrais-je y porter votre message ? Vu que les voies terrestres et supraterrestres ne peuvent communiquer, j'ai peur de vous décevoir en manquant à ma mission. Connaîtriez vous le moyen de me faire parvenir jusque-là ?

PARTIE II

- Je ne saurais vous dire combien m'est chère votre bonté ! lui répondit-elle en pleurant. Si jamais j'obtenais une réponse, ce ne serait pas assez de ma vie pour vous témoigner ma gratitude. Avant d'avoir votre consentement, comment aurais-je osé parler ? Maintenant, je puis vous dire qu'il n'est pas plus difficile d'aller à Dongting que de se rendre à la capitale.

Et pour répondre aux questions de Liu, elle précisa :
- Il y a au nord du lac Donting un grand oranger, vénéré par les paysans comme un arbre sacré du village. Enlevez cette ceinture, attachez quelque chose au bout, et puis frappez trois fois sur le tronc d'arbre. Quelqu'un viendra répondre à votre appel. Suivez-le, et vous n'aurez aucune difficulté. Je serais heureuse qu'en dehors de la lettre, vous veuillez dire vous-même à mes parents ce que je viens de vous confier à coeur ouvert. N'y manquez pas, je vous en supplie mille et mille fois !

- Je suis tout à vos ordres ! lui répondit Liu.

Alors elle sortit une lettre de sa poche, la lui présenta avec une révérence, et puis regardant vers l'Orient, elle pleura, incapable de contenir sa douleur. Liu profondément ému, mit la lettre dans son sac, et lui posa encore une question :
- Comment se fait-il que vous gardiez ces moutons ? Se peut-il que les divinités mangent aussi de la viande ?

- Non, répondit-elle. Ce ne sont pas des moutons, mais des porteurs de pluie.

- Que voulez-vous dire ?

- Oui, ils appartiennent à la catégorie des éclairs et des foudres.

Liu se mit à les regarder attentivement, et remarqua qu'ils marchaient la tête haute et les yeux fulgurants. Leur façon de brouter et de boire était aussi tout à fait surprenante, mais quant à la taille, aux cornes et à la toison, rien ne les différenciait des moutons ordinaires.

- Comme votre messager, ajouta Liu, j'espère que lorsque vous serez revenue au lac Dongting, vous ne refuserez pas de me voir.

- Loin de là ! s'exclama-t-elle. Vous me serez cher comme un parent !

Là-dessus, on se quitta en se disant adieu. Liu s'en alla vers l'est. Au bout de quelques dizaines de pas, il se retourna, la jeune femme et les moutons avaient disparu.

Ce soir-là, il parvint à la ville et prit congé de son ami.

PARTIE III

Un mois après, il arriva dans son pays natal, rentra chez lui, et puis se rendit aussitôt au lac Dongting. Là, précisément au sud du lac, il trouva l'oranger sacré et, ayant changé de ceinture, faisant face à l'arbre, il frappa trois coups et attendit. Bientôt, il vit sortir des ondes un guerrier qui vint le saluer et demanda :
- De la part de qui venez-vous, cher hôte ?

Sans dévoiler encore la vérité, il répliqua :
- Je voudrais rendre visite à votre grand roi.

Fendant les eaux pour lui ouvrir le chemin, le guerrier se mit à guider Liu au sein du lac en lui faisant cette recommandation :
- Fermez les yeux, vous y serez dans un instant.

Liu obéit et bientôt on se trouva devant un grandPalais. Là, s'élevaient des groupes de pavillons avec des milliers de portails et d'arcades, entourés de toutes sortes de plantes et d'arbres les plus rares du monde. Le guerrier lui fit signe de s'arrêter au coin d'une grande salle, en lui disant :
- Mon hôte, veuillez attendre ici.

- Quel est cet édifice ? demanda Liu.

- C'est le Palais de la Voute divine. Répondit le guerrier.

En regardant plus attentivement, Liu vit qu'il contenait toutes les pierres précieuses connues de l'homme : Colonnes de jade blanc, escaliers de jaspe, lits de corail, persiennes de cristal, linteaux d'émeraudes incrustés d'émaux, poutres couleur de l'arc-en-ciel ornées d'ambre. De l'ensemble se dégageait une impression de beauté étrange, impossible à décrire.

Cependant le roi se faisant attendre, Liu dit au guerrier :
- Où est donc le Prince de Dongting ?

- Sa majesté est au pavillon de Perles noires, répondit l'homme, en train de discuter avec le Prêtre du Soleil sur le Canon du Feu. Mais ils en auront bientôt terminé.

- Qu'est-ce que le Canon du Feu ? demanda Liu.

- Notre Prince est un Dragon, dit l'homme. Donc l'eau est son élément. Avec une goutte d'eau, il pourrait innonder montagnes et vallées. Le Prêtre taoïste est un homme, donc le feu est son élément; avec une torche, il ferait brûler tout un Palais. Les propriétés des éléments étant différentes, leurs effets ne sont pas les mêmes. Comme le Prêtre du Soleil est expert dans les lois de la nature humaine, notre Prince l'a invité pour avoir un entretien avec lui.

A peine eut-il fini de parler que la porte du Palais s'ouvrit. Au milieu d'une escorte de nuée, apparut un homme vêtu de pourpre, un sceptre de jaspe à la main. Transporté de joie, le guerrier s'écria :
- Voilà notre roi !

Puis il se porta au-devant de lui pour annoncer l'arrivée de Liu. Le roi tourna ses regards vers le voyageur et lui demanda :
- N'êtes-vous pas du monde humain ?

PARTIE IV

Liu répondit affirmativement et le salua. Le roi lui rendit son salut et le fit asseoir dans le Palais de la Voûte divine.
- Notre royaume des eaux est sombre et profond, dit le Roi Dragon. Et je ne suis qu'un ignorant. Quelle raison vous amène ici, monsieur, malgré une distance de mille lieues ?

- Je suis un compatriote de Votre Majesté, dit Liu. Né dans le Sud, je suis allé faire des études dans le Nord-Ouest. Ayant échoué à un examen il y a peu de temps, comme je passais sur les bords de la rivière Jing, j'ai rencontré votre fille bien-aimée qui menait paître des moutons en pleine campagne. Les cheveux au vent et sous la pluie, elle faisait pitié à voir. Je l'interrogeai et elle me répondit qu'elle en était arrivée là parce qu'elle avait été maltraitée par son mari et abandonnée par ses beaux-parents. Tant de larmes et de paroles m'allèrent droit au coeur. Puis, elle m'a confié une lettre, et je lui ai promis de la remettre. Voilà pourquoi je suis venu ici. Il sortit la lettre et la présenta au roi.

Après l'avoir lue, le roi se cachant la face derrière sa manche se mit à pleurer.

- C'est ma faute à moi, son vieux père ! dit-il. J'ai été comme un homme aveugle et sourd, sans me douter que, loin de moi, ma pauvre enfant était tombée dans le malheur. Mais vous monsieur, simple étranger, vous êtes venu à son secours. Tant que je vivrai, je n'oublierai jamais votre bonté ! Là-dessus, il pleura encore quelques instants, et son entourage était aussi en larmes.

Alors, un eunuque du Palais s'approcha du roi, lequel lui donna la lettre avec ordre de la passer aux femmes dans le Palais intérieur. Un moment après, des lamentations se firent entendre du fond de ces appartements. Alarmé, le roi dit à ses sujets :
- Vite, dites aux femmes de ne pas faire de bruit, de peur que le Prince de Qiantang ne l'entende !
- Qui est ce Prince ? demanda Liu.

- Mon jeune frère, dit le Roi Dragon. Il était Prince de la rivière Quiantang, mais il vit rarement dans la retraite.

- Pourquoi ne voulez-vous pas qu'il sache cette nouvelle ? demanda Liu.

- Parce qu'il est trop impétueux, dit le roi. Jadis, les neuf années de déluge sous le règne de Yao le Sage, furent la conséquence d'un de ses accès de colère. Dernièrement, il se querella avec les généraux du Ciel et inonda les cinq montagnes. Comme j'ai à mon crédit quelques mérites anciens et récents, le Souverain du Ciel a accordé son pardon à mon frère, mais il doit être gardé ici dans les chaînes. les gens de Quiantang sont encore à attendre tous les jours son retour.

A ces mots, un grand bruit éclata. On aurait dit que le ciel allait s'écrouler et la terre se fendre. Tout le Palais fut secoué comme grain au van. Parmi les tourbillons de fumée et de nuages montant de toutes parts, appatut un Dragon écarlate, long de mille pieds, yeux d'éclair, langue de sang, écailles vermillon, crinière de flammes, avec au cou une grande chaîne d'or attachée à un pilier de jade.

Et soudain, entouré de foudres et d'éclairs, tandis que se déchaînait une tempête de neige et de grêle mêlées, il s'élança dans le ciel azuré et disparut.

Pris de panique, Liu tomba à terre. Le roi vint lui-même le relever en disant :
- N'ayez pas peur, ce n'est rien.

PARTIE V

Après un bon moment, notre bachelier commença à recouvrer ses esprits. Lorsqu'il se sentit suffisamment rassuré, il demanda à se retirer :
Permettez-moi seulement, dit-il, de rentrer vivant et de ne plus revenir.

- Point n'est besoin de partir, dit le roi; mon frère a l'habitude de s'en aller ainsi, mais il ne reviendra pas de la même façon. Veuillez rester encore un moment. Il donna l'ordre de servir à boire. Et on se mit à trinquer en toute cordialité.

Bientôt s'éleva une brise d'allégresse apportant avec elle des nuages de bon augure. Dans un déploiement de pennons et de drapeaux, au son des flûtes et des pipeaux, derrière mille et mille jeunes filles en robe rouge qui babillaient et riaient aux éclats, s'avançait une belle fille aux sourcils bien arqués, toute parée de bijoux étincelants, et habillée de soie flottant en long rubans.

Quand elle fut proche, Liu s'aperçut qu'elle n'était autre que la belle éplorée qui lui avait confié le message; maintenant elle avait l'air heureux et triste à la fois, versant encore quelques larmes de joie. Et tandis qu'à droite, à gauche, des fumées rouges et pourprées montaient de toutes parts, tantôt voilant, tantôt laissant voir sa silhouette, elle pénétra dans le Palais intérieur, au milieu des parfums dansant autour d'elle.

Le roi tout riant, dit à Liu :
- La voilà revenue, la captive de la rivière Jing !

Puis, en s'excusant, il rentra dans le Palais intérieur, d'où s'échappèrent bientôt des échos de douces effusions qui durèrent un bon moment. Puis, le roi revint et se mit à boire avec Liu. Il y avait là un autre homme , vêtu de pourpre, un sceptre de jaspe à la main, se tenant à côté du roi, avec un air de fierté et de magnificence. Le roi le présenta à Liu :
- Voici le Prince de Qiantang.

Liu se leva et alla le saluer. le Prince lui rendit son salut avec la plus grande civilité, et lui dit :
- Ma pauvre petite nièce a été péniblement humiliée par son chenapan de mari. Monsieur, c'est grâce à votre magnanimité que les nouvelles de ses malheurs ont pu de si loin venir jusqu'à nos oreilles. Sans cela , elle serait devenue moins que la boue de la rivière Jing. Mes paroles sont impuissantes à vous exprimer ma gratitude.

Liu le remercia tout en saluant, et revint à sa place sans oser rien dire de plus. Alors le Prince se tourna vers son frêre aîné et lui raconta son aventure :
- Après avoir quitté ce matin le Palais de la Voûte Divine, j'arrivai en une heure à la rivière Jing, là le combat que j'ai livré a duré une heure, et j'ai mis encore une heure pour revenir ici. Sur le chemein du retour, j'ai volé jusqu'au neuvième ciel et j'ai fait un rapport au Souverain céleste. Quand il eut appris l'injustice commise, il m'a pardonné et m'a relevé de ma peine ancienne. Ce matin, j'étais trop emporté par mon indignation et trop pressé de partir pour vous dire adieu. Je regrette d'avoir troublé tout le Palais et surtout d'avoir alarmé notre cher hôte, ce qui est chose impardonnable.

Il se recula et salua encore.

- Combien de gens avez-vous tués ? lui demanda le roi.

- Six cent mille.

- Avez-vous détruit des champs ?

- Sur environ trois cents lieues.

- Où est-il, cet ingrat de mari ?

- je l'ai mangé.

Pris de pitié, le roi dit :
- A vrai dire, ce chenapan-là était intolérable. Mais vous y êtes allé un peu fort. Heureusement que l'Empereur du Ciel, toujours clairvoyant, vous a pardonné à cause de la grande injustice qui fut commise, autrement comment aurais-je pu prendre votre défense ? Désormais, il ne faut plus agir ainsi.

Le Prince le salua encore une fois.
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MessageSujet: Re: Légendes de 11 à 20   Légendes de 11 à 20 Icon_minitime2/2/2007, 09:54

PARTIE VI

Ce soir-là, on logea Liu dans la Salle de la Clarté cristaline. Le lendemain, au Palais des Emeraudes, un autre festin fut donné en son honneur. Toute la famille royale y prit part. Il y eut un grand concert et l'on servit toutes sortes de bons vins et de mets délicats.

Tout d'abord, sur la droite, aux sons des trompettes, des cors, des tambours et des carillons, dix mille guerriers dansèrent avec des étendards, des épées et des hallebardes. L'un d'eux s'avança pour annoncer que c'était la Marche triophale du Prince de Qiantang.

Cette danse martiale fut exécutée avec tant de bravoure et de fougue que cela donna la chair de poule à tous les spectateurs. Puis, au son des gongs, des cymbales et des instruments à cordes ou de bambou, un millier de jeunes filles, vêtues de soie et parées de perles et de jade, dansèrent sur la gauche.

L'une d'elles s'avança pour annoncer que c'était la Célébration du Retour de la Princesse. Les mélodies étaient si douces et si plaintives que tout le monde inconsciemment laissa tomber des larmes. Les deux danses terminées, le Roi Dragon, transporté de joie fit distribuer de la soie aux danseurs et danseuses. Puis on se mit à table en rangs serrés, buvant du vin à coeur joie. Au milieu du festin, le roi se leva, frappant la mesure sur la table et chanta :

Vaste est le grand ciel bleu, et la terre sans limite !
Infini, l'idéal qu'en soi chacun abrite.
Le renard se croit dieu, et le rat se croit saint,
Souillant le temple, enfoui sous le mur qui le ceint.
Soudain, un coup de foudre, et tout est dispercé !
Grâce à votre bonté qu'à flots avez versée,
Dans mes bras paternels, ma fille enfin revient !
Pour vous dire merci, aucun mot ne me vient !

Après le chant du roi, le Prince le salua et se mit à chanter :

Unis de par le ciel, par la mort séparés,
Lui fut époux indigne, elle, mal épousée !
Sur les bords de la Jing, elle traîna son ennui,
Cheveux toujours au vent, robe trempée de pluie.
Grâce à vous, ô seigneur, messager valeureux,
Nous sommes réunis, plus que jamais heureux !
Jamais, au grand jamais, n'en serons oublieux !

Le chant terminé, le roi et le Prince se levant ensemble offrirent chacun une coupe à Liu, qui, hésitant d'abord, finit par l'accepter et la vida d'un trait. Puis, après avoir présenté à son tour deux coupes aux deux Princes, il chanta :

Nuage de jade passe, ainsi que l'eau s'enfuit.
O Princesse pleurant comme fleur sous la pluie !
Un message envoyé la délivra de peine.
Son outrage vengé, et la voilà sereine.
Merci pour le concert, merci pour le festin !
Ma maison de montagne attend le pèlerin,
Je vous dirai adieu le coeur lourd de chagrin !

PARTIE VII

Quand il eut fini de chanter, les vivats fusèrent de toutes parts. Le roi sortit une boîte de jaspe contenant une corne de rhinocéros, propre à ouvrir les eaux. Et de même, le Prince disposa sur un plateau d'ambre un jade qui éclaire la nuit. Debout, ils les offrirent à Liu, qui les accepta avec des remerciements.

Puis, toutes les femmes du Palais intérieur le comblèrent de soieries, de perles et de pierres précieuses, qui comme des monticules brillants et diaprés s'accumulaient devant et derrière lui. Et Liu de regarder à droite, à gauche, confus, souriant et saluant sans cesse. A la fin du festin, lorsqu'il en eut assez de vin et de plaisir, il se retira et passa la nuit dans la Salle de la Clarté cristalline.

Le lendemain, on le fêta encore au Pavillon de la Lumière limpide. Le Prince de Quiantang, la tête montée par le vin, cambré comme un fauve, dit à Liu d'un air brutal:
- Savez-vous bien qu'un roc dur se fend, mais ne plie pas, et qu'un brave se fait tuer plutôt que de se laisser humilier ? Je tiens à vous proposer quelque chose. Si vous consentez, tout ira bien entre nous. Sinon, nous périrons tous les deux; Qu'en dites-vous?

- Veuillez me dire de quoi il s'agit, lui répondit Liu.

- Vous savez que la femme du seigneur de Jing est la fille de notre souverain, dit le Prince. Belle et vertueuse, elle est hautement considérée par tout le monde. Par malheur, elle a été victime d'un homme indigne. Mais tout cela est fini maintenant. Je voudrais vous la présenter et serais heureux d'entrer dans votre parentée pour toujours. Ainsi celle qui vous doit tout par reconnaissance aurait le bonheur de vous servir, et nous qui l'aimons aurions le plaisir de la voir en bonnes mains. Un homme magnanime ne s'arrête pas à mi-chemin. Acceptez-là!

Alors Liu devint grave un moment, puis éclata de rire et dit :
- Je n'ai jamais pensé que le Prince de Qiantang aurait des idées aussi peu dignes d'un galant homme. J'ai tout d'abord entendu dire que, mis en colère vous aviez enjambé les neuf continents et déplacé les cinq montagnes; et puis je vous ai vu rompre la chaîne d'or et arracher le pilier de jade pour courir venger votre nièce. Il me semblait que nul ne fut comparable à vous pour la bravoure, et la droiture; courir à la mort pour venger une offense, risquer sa vie pour une personne qui vous est chère, voilà en effet de vraies marques de grandeur. Mais maintenant, alors que les musiciens s'accordent et que l'hôte et le convive sont en parfaite harmonie, pourquoi tentez-vous de m'imposer votre volonté sans égard à l'honneur? Ce n'est pas là ce que j'ai toujours espéré de vous! Si je vous rencontrais sur une mer en furie, ou dans une montagne ténébreuse, vous pourriez m'intimider avec vos écailles et votre barbe de hérisson, me couvrir de nuages et de pluie, et me menacer de la mort; dans ce cas là, je vous prendrais pour une bête et ne vous reprocherais rien. Mais maintenant vous voilà habillé comme un être humain, assis là pour discuter des civilités, et vous avez si bien fait vôtres tous les sentiments humains et toutes nos délicatesses de conduite, qu'il y a parmi les hommes très peu de braves et de sages qui puissent vous égaler, sans parler des monstres aquatiques. Se pourrait-il qu'usant de l'avantage de votre corps de reptile, de votre tempérament violent, et du prétexte de l'ivresse, vous osiez maintenant me forcer la main? Voilà qui ne va guère avec la droiture. certes, mon corps est bien faible, et je tiendrais aisément sous une seule de vos écailles; pourtant, je saurais, avec un coeur invincible triompher de votre inhumanité. Prince, j'espère que vous allez réfléchir un peu!

Honteux et confus, le Prince s'excusa et dit :
- Elevé dans le Palais, je suis resté dans l'ignorance des règles de la bienséance. Tout à l'heure, avec des termes un peu trop libres, j'ai blessé en vous le point d'honneur. A la réflexion, c'est là une faute plus que blâmable, je serais très heureux que vous veuillez bien me garder votre amitié intacte.

PARTIE VIII

Ce soir-là, on festoya encore avec autant de plaisir que la veille. Liu et le Prince devinrent de bons amis. Le jour suivant, Liu demanda la permission de s'en aller. La Reine donna un autre festin en son honneur dans la Salle de la lumière diffuse, en compagnie d'un grand nombre de concubines, de servantes et d'eunuques. La Reine lui dit en versant des larmes :
- Ma fille est si redevable à vos bontés que nous ne saurions vous témoigner assez notre gratitude. Et voilà que déjà vous allez nous quitter !

Et elle fit venir la Princesse pour le remercier.

- Nous reverrons-nous un jour? lui demanda la reine.

Liu, en ce moment-là, regretta de n'avoir pas accepté la proposition du Prince de Qiantang. Il se sentit le coeur bien lourd. Le festin fini, il leur fit ses adieux, et toute la salle était en larmes. Au moment du départ, on le combla encore de présents, dont d'innombrables joyaux précieux.

Liu sortit du lac en empruntant le même chemin, escorté par une douzaine d'hommes qui, chargés de ses bagages ne le quittèrent qu'à son arrivée dans sa demeure. Puis, il se rendit à Yangzhou chez un joaillier pour vendre quelques-uns de ses bijoux, dont pas même un centième suffit déjà à le rendre plus que millionnaire. Et nul parmi les hommes riches de la rive droite du Huai ne put désormais se comparer à lui.

Il se maria avec une jeune fille nommée Zhang, qui mourut bientôt. Il se remaria ensuite avec une autre jeune fille nommée Han, qui mourut quelques mois après. Alors, il alla s'installer à Nanjing.

Souvent, l'ennui du veuvage lui fit penser à prendre une autre femme. Vint une entremetteuse qui lui fit cette proposition :
- Je connais une fille appelée Lu, originaire du district de Fanyang. Son père Lu Hao a été magistrat de Qingkiu; dans sa vieillesse, épris de taoïsme, il s'est mis à errer seul parmi les nuages et les sources, et il a disparu on ne sait où. Sa mère s'appelait Zheng. L'année dernière, la jeune fille a été mariée dans une famille Zhang à Qinghe, mais malheureusement le mari mourut aussitôt. Sa mère qui plaint sa jeunesse et sa beauté, voudrait lui trouver un bon mari. Est-ce que cela pourrait vous intéresser ?

Pour célébrer le mariage, Liu chercha un jour propice. Les deux familles étant de haute société, la magnificence des cérémonies, des équipages et des cadeaux fit tourner la tête à tous les citadins de Nanjing.

Un mois après le mariage, un soir en rentrant dans la chambre, Liu regarda sa femme et remarqua soudain qu'elle ressemblait fort à la fille du Roi Dragon, tout en la dépassant encore par la plénitude de sa beauté. Alors, il lui raconta ce qui était arrivé autrefois.

- Est-ce possible, une chose pareille? lui dit sa femme. Mais, à propos, savez-vous que nous allons avoir un enfant.

Liu à cette nouvelle, l'en aima encore davantage.

Un mois après la naissance de l'enfant, habillée d'une robe somptueuse et parée de bijoux, sa femme reçut toutes leurs relations à la maison. Au cours de la réunion, elle dit à Liu avec un petit sourire :

- Est-ce que vous ne vous rappelez plus m'avoir rencontrée au temps jadis ?
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MessageSujet: Re: Légendes de 11 à 20   Légendes de 11 à 20 Icon_minitime2/2/2007, 09:54

PARTIE IX

- Je fus une fois messager de la fille du Roi Dragon, répondit Liu. Et toujours je m'en souviens.

- C'est moi la fille du Roi Dragon, dit-elle. Grâce à vous, l'injustice de la rivière Jing fut mise au jour, aussi en témoignage de ma gratitude, ai-je juré de payer de retour vos bontés. Mais puisque vous aviez apporté un refus à la proposition de mon oncle, vivant bien loin l'un de l'autre, et dans deux mondes différents, nous n'avons pu échanger aucun mot.

Mes parents voulurent me marier avec le fils du dieu de la rivière Zhuojin, mais je ne pouvais ni désavouer mon serment ni désobéir à mes parents. Que faire alors ? Bien que vous m'ayez refusée et qu'il me fût impossible de vous voir, je jurai encore de vous garder mon coeur jusqu'à la mort. Et je confiai ma peine à mes parents qui me prirent en pitié, me laissant la liberté d'aller vous trouver.

Mais, à ce moment-là, vous avez successivement pris pour femme les demoiselles Zhang et Han. Après la mort de celles-ci, vous êtes venu habiter ici. L'occasion se présentait donc; mes parents furent heureux de voir se réaliser enfin mon espoir. Maintenant qu'il me soit donné de vous servir et vous aimer pour la vie et je mourrais sans regret. Là-dessus, elle pleura à chaudes larmes, puis continua :

Si tout d'abord je ne vous ai pas dit qui je suis, c'est parce que je savais que vous ne teniez guère à la beauté. Si je vous le dis maintenant, c'est parce que je sais que vous tenez à moi. Une femme telle que moi est indigne de votre coeur. Comme je sais que vous aimeriez avoir un enfant, je vous en donne un, pour avoir une raison de vivre auprès de vous. Y consentirez-vous ? Avant que je sache si vous m'aimiez, mon coeur était en proie à l'angoisse et à la tristesse.

Le jour où vous fûtes mon messager, vous m'aviez dit en souriant :
"- J'espère que lorsque vous serez revenue au lac Dongting, vous ne refuserez pas de me voir". A ce moment-là, avez-vous pensé à ce que nous sommes maintenant ? Plus tard, lorsque mon oncle vous proposait ce mariage, vous avez catégoriquement refusé. Pourquoi ? Est-ce que vous ne le désiriez vraiment pas, ou bien parce qu'il venait de vous offenser ? Dites-le -moi !

- Il faut que cela soit la destinée , répondit Liu. Quand pour la première fois, je vous rencontrai au bord de la rivière Jing, vous me sembliez si pâle et si accablée de malheur qu'irrésistiblement l'idée me vint de prendre votre défense. Mais, à ce moment-là, le coeur ne me dit que de faire passer les nouvelles de vos malheurs, sans y ajouter aucune arrière-pensée. Si j'ai dit que j'espérais que vous ne refuseriez pas de me voir à l'avenir, ce n'était là qu'une parole échappée par hasard, et rien de plus.

Lorsque le Prince de Qiantang me proposa un mariage forcé, son insolence me mit en fureur. En somme, je n'avais voulu que faire acte de justice. Comment aurais-je pu épouser une femme, après avoir causé la mort de son mari ? Voilà la première raison de mon refus. Et puis l'intégrité étant toujours le principe de ma conduite, comment aurais-je pu m'abaisser jusqu'à faire violence à ma conscience ? Voilà la seconde raison de mon refus.

Lors du festin, c'était de cette façon -là que je résonnai avec moi-même, n'ayant en vue que la droiture, sans m'effrayer de rien. Cependant, le jour de mon départ, à la vue de vos yeux si tendres, je regrettai de tout coeur ce qui avait été dit. Après cela, pris dans le tourbillon des choses humaines, je me trouvai dans l'impossibilité de vous témoigner ma gratitude.

Maintenant, quel bonheur pour moi de vous retrouver comme membre de la famille Liu ! En tout cas, l'amour que je portais à votre souvenir ne fut point une passion éphémère. Désormais, je vous aimerai toujour, d'un coeur serein !

Profondément émue, sa femme ne put d'abord que verser des larmes, et puis elle lui dit :
- Quoique je sois d'une autre essence que les hommes, ne me croyez pas dépourvue de sentiments humains. Je saurai répondre à votre bonté ! Puisque tout Dragon peut vivre dix mille ans, vous aurez avec moi la même longévité. Nous passerons librement n'importe où, sur terre et sur mer. Fiez-vous à moi !

- Je n'aurais jamais imaginé que vous alliez me tenter en m'offrant l'immortalité des dieux !dit Liu en riant de joie.

PARTIE X

Tous deux, retournèrent alors au lac Dongting, où la magnificence de la réception royale dépassa toute description.

Plus tard, ils s'installèrent à Nanhai (Canton) pendant quarante ans. Leurs châteaux, leurs équipages, leurs festins et leurs habits étaient d'une splendeur princière. Liu se montra généreux avec toutes ses relations. Malgré son grand âge, la pérennité de son air de jeunesse faisait l'admiration de tous.

Pendant la période de Kaiyuan (713-741), comme l'Empereur, désireux de trouver le secret de longue vie, faisait rechercher partout des alchimistes, Liu n'ayant plus de tranquilité retourna avec sa femme au Lac. On perdit sa trace dans le monde pendant plus de dix ans.

Vers la fin de la période de Kaiyuan, son jeune cousin, Xue Gu, destitué de sa fonction de magistrat dans la capitale, fut exilé dans le Sud-Est. Comme il traversait en plein jour le lac Dongting et regardait au loin devant lui, il aperçut soudain une montagne toute verte surgissant des flots à l'horizon. Se pressant à ses côtés, les bateliers surpris s'écrièrent :
- Il n'y a pas de montagne par là, ça doit être un monstre des eaux!

En un clin d'oeil, la montagne s'approcha du bateau, un barque peinte en couleurs vives descendit lentement de la montagne et se dirigea droit sur l'embarcation de Xue. Quelqu'un lui cria de la barque :
- Maître Liu vient à votre rencontre !

Alors, Xue comprit. Aussitôt arrivé au pied de la montagne, retroussant sa robe, il se mit à grimper rapidement. Là-haut, il y avait des Palais comme ceux de la terre et Liu était là, avec des musiciens devant lui, et des jeunes filles parées de perles derrière lui. La richesse des objets d'art surpassait de loin celle du monde des hommes. Parlant avec encore plus d'éloquence et paraissant encore plus jeune qu'avant, Liu le reçut sur les marches, et lui prit la main, disant :
- Il y a si peu de temps que nous nous sommes quittés et voici déjà que vos cheveux grisonnent !

- Vous êtes promis à l'immortalité, tandis que moi, hélas ! je ferai des os secs, rétorqua Xue en souriant.

Alors, Liu lui donna cinquante capsules et dit :
- Chacune de ces pilules vous donnera un an de plus à vivre. Quand vous approcherez du terme de votre vie, revenez encore ici. Il ne faut pas rester trop longtemps dans le monde humain, où vous aurez tant à souffrir.

Ils festoyèrent alors joyeusement, et puis Xue le quitta. Liu s'effaça alors sans laisser de trace, mais Xue raconta souvent cette histoire à son entourage. Quarante-huit ans après, Xue disparut à son tour.

Moi, Li Chaowei de Gansu, en écrivant cette histoire je me sens rempli d'admiration. Cela ne démontre-t-il pas que la principale espèce de chacune des cinq catégories d'êtres vivants ( Dragon * Voir ci-dessous) possède des forces surnaturelles. Sans cela, comment ces reptiles pourraient-ils assumer des vertus humaines ?

Le Roi Dragon de Dongting se montra vraiment grand et magnanime, tandis que l'impétuosité et la franchise caractérisent la conduite du Prince de Qiantang. Certainement ce sont là des vertus qui se transmettent de fort loin. Xue Gu, cousin de Liu fut le seul être humain qui pût s'approcher du royaume des eaux. Malheureusement, il a raconté cette histoire sans l'avoir écrite.
Comme elle est intéressante, je la transcris ici.

Extrait des contes de la dynastie des Tang,
de Li Chaowei.

* Les Chinois de l'antiquité divisaient le royaume des animaux en cinq catégories :
Animaux à plumes, à poil, à cuirasse, à écailles, et au corps nu.

Ces catégories comportaient comme principales espèces :
Le Phoenix, la Licorne, la Tortue, le Dragon et l'Homme.

De l'Homme, le plus intelligent de tous, provinrent quelques-unes des vertus que possédaient les autres.
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MessageSujet: Re: Légendes de 11 à 20   Légendes de 11 à 20 Icon_minitime2/2/2007, 09:56

La Dame du Lac de l'Ouest

PARTIE I

Le lettré Chen Bijiao, prénommé aussi Mingyun, était natif de Yan. De famille pauvre, il était secrétaire du commandant en second Jia Wan. Leur bateau était ancré au milieu du lac Dongting quand soudain un poisson Dragon émergea. Jia banda son arc et tira une flèche sur le dos de l'animal. Aussitôt un poisson saisit sa queue pour l'emmener, mais en vain; ils furent capturés ensemble et attachés près du mât où ils attendaient la mort.

Le poisson Dragon ouvrant et fermant à demi sa gueule semblait appeler au secours. Le lettré eut pitié d'eux et demanda à Jia de les relâcher. Comme il avait sur lui des onguents pour refermer les blessures, à titre d'essai il les appliqua sur sa plaie et rejeta les deux animaux à l'eau. Ils flottèrent un moment à la surface puis plongèrent dans les profondeurs.

Un an après, retournant vers le nord, comme il traversait à nouveau le lac Dongting, son bateau fit naufrage au cours d'une tempête. Chen flotta toute une nuit soutenu par un grand panier de bambou auquel il avait eu la chance de s'agripper. Il rencontra enfin un tronc d'arbre grâce auquel il put nager jusqu'au rivage.

Après bien des efforts, il réussit à se hisser sur la berge; il remarqua alors qu'un autre naufragé le suivait. C'était un de ses serviteurs. Il fit un effort pour le tirer de l'eau, mais il constata qu'il était sur le point d'expirer. Navré et ne sachant que faire, il ne put que s'allonger à côté de lui.

Il voyait des collines qui rivalisaient de verdure et des saules pleureurs qui se balançaient au vent. Mais pas un passant, personne à qui demander son chemin. De l'aube jusqu'au matin, il resta là à se tourmenter.

PARTIE II

Tout à coup, il vit qu'un léger mouvement agitait les membres de son serviteur. Tout heureux il le remua et quand il lui eut fait vomir des boisseaux d'eau, celui-ci reprit bientôt connaissance. Ils mirent alors leurs vêtements à sécher au soleil sur les rochers. Vers midi, ils purent les renfiler.

Leurs ventres creux faisaient entendre des glouglous, et ils étaient torturés par la faim. Ils franchirent rapidement la colline dans l'espoir de trouver un village. A peine étaient-ils arrivés à mi-hauteur qu'ils entendirent des flèches siffler. Lorsqu'ils essayèrent de discerner d'où venaient les traits, ils virent passer deux jeunes filles chevauchant des coursiers qui galopaient aussi vite que des petits pois qui s'échappent de leur gousse.

Un carré de soie rouge en bandeau sur le front et une plume de faisan plantée là-dessus, deux amazones habillées d'une tunique violette aux manches étroites, serrée à la ceinture d'une bande de brocart vert, passèrent la crête de la colline, l'une bandant son arc, l'autre portant un faucon sur le bras. Elles étaient suivies de quelques dizaines d'autres belles amazones, toutes habillées de même et chassant à travers les brousailles.

Interdit, le lettré n'osait avancer. Un homme, un palefrenier probablement, arriva au pas de course. Le lettré s'informa auprès de lui de ce qui se passait.
- C'est la Dame du lac de l'Ouest, fit celui-ci, qui chasse dans la montagne.

Le lettré lui raconta alors son aventure et lui avoua qu'il avait grand faim. Le valet ouvrit sa sacoche pour lui donner la nourriture qu'il avait prise pour lui-même, tout en disant:
- Eloignez-vous vite; la moindre offense à son altesse vous conduirait à la mort. Pris de peur, le lettré descendit la pente en courant, et vit vaguement, à travers les arbres touffus, de grands bâtiments avec des pavillons qu'il prit pour un temple.

PARTIE III

Ils s'en approchèrent et arrivèrent au pied d'une enceinte devant laquelle coulait une rivière; un pont de pierre menait à un grand portail de laque rouge entrouvert. Surplombant une petite porte, il vit des pavillons dont les toits touchaient presque les nuages. Il pensa qu'il s'agissait d'un parc ou d'un jardin d'un dignitaire. Il entra tout en écartant les lianes qui obstruaient le chemin.

Un parfum de fleurs lui arriva par bouffées. Un corridor en zigzag le conduisit dans une autre cour où des dizaines de saules pleureurs se balançaient jusqu'aux avancées des toits peintes en rouge. Des pétales de fleurs s'envolaient tandis que gazouillaient les oiseaux, des feuilles d'orme s'éparpillaient au gré du zéphyr comme une pluie de sapèques. C'était à la fois un charme pour les yeux et un enchantement pour le coeur. Le lettré se croyait hors de ce monde vulgaire.

Au-delà d'un petit kiosque, une balançoire avec laquelle on eût pu monter jusqu'aux nuages pendait immobile; il lui manquait la présence humaine. Pensant que l'endroit devait être proche de l'appartement des femmes, le lettré n'osa s'aventurer plus loin.

Tout à coup un bruit de course précipitée et de rires de jeunes filles se firent entendre près de la porte, et il s'enfuit dans les buissons de fleurs avec son serviteur. Puis la rumeur joyeuse se rapprocha de plus en plus et il put distinguer ces paroles:
- Pas de chance aujourd'hui, fit une des jeunes filles nous revenons quasi bredouilles!

- Heureusement, s'écria une autre, que notre Princesse a pu abattre une oie sauvage! Sinon c'eût été peine perdue pour nos serviteurs et nos chevaux!

Bientôt un essaim de belles filles s'avança, escortant une jeune personne vers le kiosque où on la fit asseoir. En costume de chasse avec ses manches serrées aux poignets, elle devait avoir de quatorze à quinze ans, et ses cheveux flottants tout comme sa taille flexible semblaient onduler dans le vent; même la fleur de Qiong (Fleur légendaire de la Chine antique) ne pouvait égaler sa beauté. les servantes lui servirent du thé et allumèrent de l'encens; c'était un tableau éblouissant comme un amas de brocart.

PARTIE IV

Peu après, lorsque la jeune fille se fut levée pour descendre les marches du kiosque, l'une des suivantes lui demanda:
- Après la fatigue de la chevauchée, pouvez-vous encore vous exercer à la balançoire?

Souriante, elle acquiesça. Aussitôt l'une la prit par l'épaule, une autre la soutint par le bras, tandis que d'autres encore relevaient le pan de sa jupe et lui soulevaient les pieds pour l'installer sur la balançoire. Elle empoigna les cordes, se lança de ses pieds effilés sur le trapèze volant telle une hirondelle dans les cieux, puis elle redescendit avec l'aide de ses servantes. D'une seule voix celles-ci s'exclamèrent:
- Vous avez vraiment l'air d'une fée, Princesse!

Et elles s'en furent dans un essaim de rires. Le lettré les suivait des yeux, son esprit planant comme dans un rêve. Puis, le silence rétabli, il s'avança jusqu'à la balançoire, perdu dans ses pensées.

Tout à coup, il découvrit un carré de soie rouge près d'une haie de bambous. Présumant que ce mouchoir avait été égaré par une des jolies filles, il s'empressa de l'enfouir dans sa manche. Puis, comme il y avait dans le kiosque un nécessaire pour exercer la calligraphie, il écrivit ce poème sur le mouchoir:

Pourrait-on dire que celle qui se livre à ce jeu charmant
Serait une fée, une immortelle ?
Il est sûr que c'est une beauté divine qui éparpille ses lotus d'or.
Voilà qui doit faire naître la jalousie des belles du Palais de la lune, froid et spacieux.
Ne dirait-on pas qu'elle semble marcher sur les flots en montant à la neuvième voûte des cieux?

Son quatrain calligraphié, il quitta le kiosque et, tout en récitant le poème, il rebroussa chemin. Mais les portes étaient déjà verrouillées. Très embarrassé, il parcourut en vain tous les pavillons et kiosques lorsque soudain une jeune fille apparut. Surprise, elle demanda:
- Comment avez-vous pu venir jusqu'ici?

- Nous nous sommes perdus en chemin, dit le lettré, en la saluant, et nous serions heureux de bénéficier de votre secours.

- Avez-vous ramassé un carré de soie rouge?

-Oui, mais je l'ai déjà barbouillé d'encre! Que faire! dit le lettré en sortant le mouchoir.

- Que votre cadavre reste sans sépulture, s'écria-t-elle terrifiée. C'est une chose dont la Princesse se sert tous les jours, et maintenant cette soie est toute barbouillée!

Chen blêmit et implora son aide.

- Chercher à regarder en cachette les bâtiments du Palais constitue déjà un crime impardonnable! dit-elle. Cependant vos qualités littéraires me poussaient à vous sauver. Mais devant ce nouveau crime commis délibérément, pourrais-je vous tirer d'affaire?

Sur ce, elle prit le carré et partit. Au comble de l'anxiété, le lettré attendait la mort, le cou tendu, regrettant de ne pas posséder d'ailes pour s'envoler.
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MessageSujet: Re: Légendes de 11 à 20   Légendes de 11 à 20 Icon_minitime2/2/2007, 09:57

PARTIE V

Un moment après la servante revint le féliciter tout bas:
- Vous aurez la vie sauve. La Princesse a examiné le carré trois ou quatre fois, visiblement sans colère. Vous serez probablement relâché. il vous faut attendre patiemment, mais surtout ne pas vous mettre à grimper sur un arbre ou à escalader un mur. On ne le vous pardonnerait pas.

A la nuit tombée, ne sachant encore quel sort lui était réservé, Chen sentit que la faim lui creusait terriblement l'estomac. Peu après, la servante revint, une lanterne à la main, suivie d'une autre fille apportant un pot de vin et un panier plein de mets à l'intention du lettré. Celui-ci s'informa de son sort.

- Profitant d'un moment propice, j'ai demandé à la Princesse d'avoir la bonté de relâcher le lettré du jardin qui risquait de mourir de faim. Après avoir mûrement réfléchi, elle m'a dit : "Où pourrait-il aller dans cette nuit profonde?" C'est alors qu'elle m'a envoyée vous offrir ces provisions. Ce n'est donc pas une mauvaise nouvelle!

Le lettré se tourmenta toute la nuit, sentant toujours une menace peser sur lui. Au début de la matinée, la servante revint lui apporter de quoi manger. Il la supplia de parler pour lui.

- Si la Princesse ne s'est prononcée ni pour la mort ni pour l'élargissement, que pourrions-nous dire, nous les servantes?

Au coucher du soleil, alors qu'il attendait impatiemment la jeune fille, celle-ci entra en courant le souffle coupé et dit:
- C'en est fait; des bavardes ont raconté l'affaire à la favorite du roi, laquelle a jeté le carré par terre en se répandant en invectives et en vous traitant de grossier personnage; le malheur vous guette!

Effrayé à l'extrême, le visage terreux, le lettré se jeta à genoux pour lui demander conseil. Un vacarme se fit entendre. La servante se retira en agitant la main. Munis de cordes, plusieurs hommes entrèrent à grand fracas.

Une servante du groupe, fixant les prisonniers, s'exclama:
- Mais, c'est le jeune Chen! Attendez! Attendez! continua-t-elle tout en empêchant les hommes aux cordes d'agir, attendez que j'informe son Altesse!

Elle s'en fut en hâte et revint peu après annoncer:
- Son altesse appelle le jeune seigneur Chen.

PARTIE VI

Celui-ci, tout tremblant, obéit. Ayant franchi des dizaines de portes, on arriva à un Palais dont l'entrée était voilée d'un store orné de pièces de jade aux crochets d'argent. Une jolie femme leva le store et annonça:
- Le seigneur Chen!

Une belle dame somptueusement parée se tenait devant lui. Il se prosterna en disant:
- Votre humble sujet solitaire qui habite à dix mille lis d'ici vous supplie de lui faire grâce de la vie!

La dame s'approcha, le releva tout en lui expliquant:
- Sans votre aide je n'existerais plus aujourd'hui. Mes servantes sont si stupides qu'elles ont failli offenser mon noble visiteur! C'est impardonnable!

Elle offrit un grand festin en l'honneur du lettré. On buvait dans des coupes ciselées. Chen ne s'expliquait toujours pas la raison d'une telle réception.

- J'ai toujours regretté de ne pas avoir pu vous rendre grâce de m'avoir sauvé la vie, fit-elle. Ma fille est honorée de votre inscription sur son mouchoir en témoignage de votre admiration. C'est la destinée qui vous a réunis. Je l'enverrai auprès de vous ce soir.

Comblé par des circonstances aussi inespérées, le lettré restait abasourdi. Vers le soir une servante vint lui dire:
- La Princesse a fini de s'apprêter.

Elle le conduisit alors dans la chambre nuptiale. Toutes les marches étaient couvertes de riches tapis et les salles éclairées par des myriades de lumières jusqu'aux lieux d'ablutions. Tout à coup les instruments modulèrent des airs variés; entourée de quelques dizaines de belles femmes étrangement parées, la Princesse, soutenue par sa suivante, accomplit la cérémonie nuptiale avec le lettré. Le Palais était embaumé par l'odeur des orchidées et du musc.

Puis, se tenant par la main, les mariés entrèrent dans la chambre nuptiale. Leur amour les comblèrent de joie.

- Moi, un humble voyageur, dit-il, je ne vous ai jamais témoigné mon dévouement, et j'ai déjà eu la chance d'avoir échappé à la mort sur le billot pour avoir souillé votre mouchoir parfumé, mais en outre vous m'accordez votre alliance. C'est un bonheur totalement inespéré!

- Ma mère, la Dame du Lac, est la fille du roi de Yangjiang. L'an dernier, comme elle se rendait en visite chez ses parents, elle fut atteinte par une flèche dans sa traversée du lac. Grâce à vous et à vos soins, elle a pu éviter le pire. Notre famille n'avait pas oublié votre bonne action. Mon espèce est différente de la vôtre, mais j'espère bien que cela ne vous inspire pas trop de crainte. J'ai obtenu du Roi Dragon le secret de l'immortalité, je voudrais que vous en bénéficiez aussi.

PARTIE VII

Le lettré comprit alors qu'elle était une fée.

- Comment se fait-il que votre servante m'ait reconnu? demanda-t-il.

- Sur le lac Dongting n'y avait-il pas un petit poisson qui tenait la queue du Dragon blessé? C'était cette servante.

- Puisque vous vouliez m'épargner, demanda encore le lettré, pourquoi retardiez-vous sans cesse ma libération?

- J'ai beaucoup de sympathie pour votre talent littéraire, mais il ne m'appartenait pas de prendre une décision; qui pourrait savoir combien j'ai hésité toute une nuit?

- Vous êtes mon Bao Shu! soupira le lettré. Et qui était donc la personne qui m'a apporté à manger?

- A-Nian, une de mes confidentes aussi.

- Comment pourrais-je lui rendre grâce?

- Elle sera à votre service; on envisagera cela pour plus tard.

- Où est donc le Grand Roi? questionna-t-il encore.

- Parti avec le dieu Guan pour soumettre Chiyou, il n'est pas encore rentré.

Après plusieurs jours passés auprès de la Princesse, craignant que sa famille, restée sans nouvelles, ne soit dévorée d'inquiétude, le lettré envoya d'abord son serviteur pour faire dire qu'il était sain et sauf.

Les siens avaient appris le naufrage sur le lac Dongting, et sa femme portait le deuil depuis un an. Au retour du serviteur, on sut seulement que le lettré n'avait point péri. Mais du fait des difficultés pour communiquer, on en vint à croire qu'il n'en finirait jamais avec sa vie errante.

Six mois plus tard, monté sur un coursier magnifique, revêtu de souples fourrures, Chen rentra inopinément chez lui, ramenant des sacs remplis d'objets précieux. Il devint fabuleusement riche , et le faste de sa maison dépassait de loin celui des grands seigneurs du lieu. En l'espace de sept à huit ans, il eut cinq enfants. Il offrait chaque jour des banquets à ses invités. Ses dépenses en matière de vins et de mets dénotaient un luxe inouï. Et comme certains l'interrogeaient sur les sources de sa richesse, il leur raconta son aventure sans rien cacher.

PARTIE VIII

Liang Zijun, son ami d'enfance, avait assumé des fonctions officielles au Sud pendant une dizaine d'années. En traversant le lac Dongting pour rentrer chez lui, il rencontra une jonque décorée avec un grand art. Des fenêtres sculptées et peintes en laque rouge s'échappaient de ravissantes mélodies, accompagnées au son du sheng* (Petit orgue à bouche portatif) et qui se répandaient sur les ondes brumeuses. Parfois de jolies femmes ouvraient les fenêtres pour contempler le paysage.

Regardant attentivement à l'intérieur de la jonque, il vit au milieu un jeune homme, tête nue, assis les jambes croisées, et près de lui une jolie fille de seize ans environ qui lui faisait des massages.

C'est certainement, se dit-il, un grand dignitaire de la région, pourtant il n'a pas d'escorte. A regarder de plus près, il s'aperçut qu'il s'agissait de Chen Mingyun. Il ne put s'empêcher de crier son nom à tue-tête.

A sa voix, le lettré fit arrêter le bateau et vint sur la proue, invitant Liang à passer à son bord. Celui-ci constata que la table était jonchée de plats entamés, et le lourd fumet des vins flottait encore dans l'air.

Le lettré donna l'ordre d'enlever immédiatement tous ces restes. Un instant après, quelques jolies servantes venaient offrir du thé et du vin, puis des plats recherchés de fruits de mer ou de produit de montagne inconnus de l'invité.

- Depuis dix ans que je ne vous ai vu, dit Liang avec curiosité, comment avez-vous pu accumuler tant de richesses et de titres?

- Est-ce mépris de votre part à l'égard du pauvre lettré que j'étais? M'était-il interdit de prospérer! fit-il en riant.

- Quelle est cette personne qui buvait avec vous tout à l'heure?

- C'est mon humble épouse.

- Où allez-vous conduire votre famille? demanda Liang , toujours plus surpris.

- Nous voguons vers l'Ouest.

Et comme Liang voulait continuer à le questionner, le lettré l'invita à boire en écoutant des chants. A peine eut-il donné cet ordre qu'éclata un concert assourdissant où les chants mêlés aux accents des instruments de musique faisaient un vacarme qui empêchait d'entendre quoi que ce fût.

PARTIE IX

Devant ces belles filles qui remplissaient la salle, Liang puisant l'audace dans son ivresse lança à Chen à forte voix:
- Seigneur Mingyun, pourriez-vous me faire goûter avec l'une d'elles à d'autres transports de joie?

- Vous avez trop bu, mon ami! fit le lettré en riant, mais je peux vous faire un don qui vous permettra d'acquérir une belle concubine.

Il demanda à sa servante d'apporter à son ami une perle éblouissante.

- Avec ce joyau, il ne vous sera pas difficile d'acquérir une Lüzhu *(Nom d'une concubine célèbre). Ceci pour vous montrer que je ne suis pas avare.

Puis, en guise d'excuse, il ajouta:
- Quelques occupations pressées m'empêchent de vous tenir compagnie plus longtemps.

Sur ce, il conduisit Liang jusqu'à son bateau et fit détacher les amarres du sien pour partir.

Lorsque Liang fut de retour dans sa famille, il se rendit chez le lettré qu'il trouva en train de boire avec ses invités. Stupéfait, il lui demanda:
- Il y a peu, vous étiez encore sur le lac Dongting; comment avez-vous pu rentrer si vite?

- Jamais de la vie! Je n'étais pas là-bas.

Liang raconta alors ce qu'il avait vu, à la grande stupeur de l'assistance.

- Vous vous êtes trompé, s'écria le lettré en riant; aurais-je donc le don d'ubiquité?

Dans la confusion qui s'ensuivit, personne ne trouva d'explication à ce phénomène.

Le lettré mourut à l'âge de quatre-vingt-un ans. A son enterrement, on fut étonné d la légéreté de son cercueil. On l'ouvrit, il était vide.

EPILOGUE

Le chroniqueur des Contes fantastiques dit : La corbeille flottant à la surface du lac pour soutenir le naufragé, le carré de soie rouge ramassé par hasard et illustré d'un poème, constituent autant de phénomènes étranges, mais tous reliés par le seul sentiment de la compassion.

Quant aux Palais, femmes, concubines et privilèges accordées aux deux vies d'un même homme, je ne sais comment les expliquer. Celui qui espère avoir à la fois une épouse charmante, des concubines ravissantes, des enfants et petits-enfants valeureux et une longévité perdurable n'est jamais satisfait qu'à moitié. Y a-t-il aussi chez les immortels des Princes de Fenyang et des Jilun*?

(*Deux personnages qui possédaient de fabuleuses richesses)
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MessageSujet: Re: Légendes de 11 à 20   Légendes de 11 à 20 Icon_minitime2/2/2007, 09:57

Le Bodhisattva et la Fille du Roi Dragon

PARTIE I

Il y a longtemps de cela vivaient aux côtés de Bodhisattva un jeune garçon nommé Sudhana et une jeune fille appelée Fille-Dragon. Celle-ci était vraiment la fille cadette du Roi Dragon de la mer Orientale. Elle avait les yeux pétillants d'intelligence, et son père l'aimait tendrement.

Un jour, il vint à l'oreille de la jeune fille qu'une grande fête se tenait sur la terre où l'on pouvait admirer toutes sortes de lanternes en forme de poissons. Elle exprima son désir d'y aller au roi son père qui refusa net, avec force signes de la tête, tout en frottant ses longues barbes.
-Sur terre règnent le désordre et la confusion. Tu es une Princesse, ta place n'est pas là-bas! lui dit-il.

Elle pleura, supplia, en vain, le Roi Dragon resta inflexible. Mais en son for intérieur la jeune fille avait pris sa décision:
"Eh bien, puisque vous ne voulez pas me donner votre autorisation, je m'en passerai!"

C'est ainsi que le soir même, à la deuxième veille de la nuit, elle sortit secrètement du Palais, prit les apparences d'une jeune et jolie fille de pêcheur et par le clair de lune, gagna le village en fête.

C'était un petit bourg de pêche. Il y avait beaucoup d'animation et bien sûr beaucoup de lanternes. Ses yeux allaient de l'une à l'autre, émerveillés par les poissons-scie, limules, poissons rouges et poissons noirs, poissons écailleux, langoustes, crabes, coquillages, conques marines, corail...

La jeune fille allait et venait sans plus savoir où donner de la tête; plus elle regardait, plus elle s'extasiait. Elle se laissait porter par la foule. Elle arriva ainsi à un carrefour encore plus animé où les lanternes multicolores s'empilaient les unes sur les autres formant des pyramides scintillantes de lumières.

La jeune fille resta longtemps à contempler, ravie de bonheur, les lanternes de rêves...

PARTIE II

Mais voilà que de la fenêtre d'une maison à étages, quelqu'un versa bien malencontreusement sur sa tête une tasse de thé froid. La surprise passée, quel ne fut pas son désespoir, car au contact de l'eau, elle allait perdre son apparence humaine et recouvrer sa forme originale.

Il lui fallait quitter les lieux au plus vite: Hors de l'eau un Dragon déchaîne le vent et la pluie, et elle ne voulait surtout pas gâcher la fête des lanternes; elle s'efforça donc de se frayer un chemin à travers la foule et courut à corps perdu vers la mer.

A peine eut-elle posé le pied sur la plage qu'elle s'affaissa sur le sable, transformée en un grand poisson. Elle gisait sur le rivage, prisonnière de sa nouvelle apparence.

Deux jeunes hommes qui se trouvaient à passer par là, s'émerveillèrent à la vue de ce grand poisson luisant:
"Quel étrange poisson, comment se fait-il qu'il soit échoué sur la plage?"

Ils n'osaient pas s'en approcher. Le plus costaud des deux, guère courageux, dit de loin:
- Jamais on n'a vu un tel poisson, c'est peut-être un mauvais présage, allons-nous-en vite!

Son ami, bien que chétif, était plus audacieux, et refusa d'abandonner là la trouvaille:
- Ca n'en est pas moins un poisson, et en le portant au marché, on en tirera un peu d'argent!

Un instant d'hésitation, et les voilà tous deux portant le poisson sur le marché.

Ce soir-là, la Déesse Bodhisattva, qui se reposait dans un bosquet de bambous, avait vu tout ce qui s'était passé; elle eût pitié de la jeune fille et décidé de lui venir en aide. Le jeune novice Sudhanna se tenait derrière elle, elle l'appela donc et lui ordonna:
- Vite, cours au marché du village, achète le plus grand poisson que tu y trouveras et relâche-le dans la mer.

Sudhana se prosterna le front contre terre et demanda:
- Mais, Bodhisattva, où trouverai-je l'argent pour l'acheter?

Bodhisattva dit en souriant:
- Il te suffira d'en prendre dans le brûle-parfum.

Sudhana s'inclina, courut vers l'autel d'Avalokitesvara, prit une poignée de cendres, et porté par une fleur de lotus, vola vers le marché.

PARTIE III

Entre-temps, sur la place du marché, les deux garçons étaient très entourés. Les gens s'extasiaient, admiratifs devant le poisson. Quelqu'un demanda le prix, mais personne n'était à même d'acheter un poisson aussi gros.
- Mes enfants, ce poisson est trop grand, dit enfin un vieillard à la longue barbe blanche. Vendez-le donc par morceaux!

Le vieux avait raison; le garçon à l'air chétif alla emprunter une hâche chez le boucher et la passa à son ami, plus robuste. Entouré comme il était par la foule, celui-ci n'avait plus peur; la hâche levée, il allait porter le premier coup lorsqu'un enfant s'écria:
- Regardez, le grand poisson pleure!

Le garçon arrêta le bras et s'approcha pour regarder; effectivement deux sillons de larmes scintillantes coulaient des yeux du grand poisson; épouvanté, il jeta par terre la hâche et se fraya en courant un chemin dans la foule.

Le jeune gringalet semblait décidé à ne pas perdre l'argent qu'il sentait déjà tinter dans ses mains. Il ramassa la hâche et allait l'abattre, lorsqu'il fut arrêté à son tour. Un jeune bonze, évidemment encore novice, cria, tout essoufflé:
- Non, arrête, je l'achète entier!

La foule en fut très étonnée:
"Comment se faisait-il qu'un petit bonze achète du poisson?"

Le vieillard à la barbe blanche prit un air soupçonneux:
- Un moine qui achète du poisson, c'est qu'il veut rompre l'abstinence et rentrer dans le monde?

Le petit novice qui avait rougi jusqu'aux oreilles se pressa d'expliquer:
- Je l'achète pour lui rendre sa liberté!

A ces mots, il sortit de sa poche une poignée d'argent qu'il tendit au jeune gringalet, tout en lui ordonnant de ramener le poisson à la mer.

PARTIE IV

Le jeune homme se réjouit:
"Voilà beaucoup de sous pour nous! pensait-il. Je vais porter le poisson au bord de la mer, et dès que le petit bonze sera parti, je reviendrai le vendre au marché!"

Il rappela son ami, et tous deux portèrent le poisson jusqu'à la plage, devancés par le novice.

Mais une fois sur le rivage, celui-ci leur ordonna de relâcher le grand poisson dans la mer. L'eau écumante formait un sillon; déjà le poisson nageait au loin. Un instant, il se retourna, fit un signe de la tête au petit bonze et plongea dans les profondeurs marines.

Le poisson disparu, il restait quand même les belles pièces d'argent. Le petit maigre les sortit de sa poche pour les montrer à son ami, mais à leur grand étonnement, en ouvrant sa main, celui-ci n'y trouva que des cendres, vite emportées par un coup de vent. Il se tourna pour chercher le petit bonze, en vain. Lui aussi s'était comme volatilisé.

Depuis la disparition de la petite Princesse, l'agitation régnait à la Cour du Roi Dragon. Celui-ci était si inquiet que ses barbes se hérissaient, son premier ministre la tortue allongeait nerveusement son cou, le général crabe bavait à la seule idée des représailles du roi, et les crevettes, ses demoiselles d'honneur, tremblaient de peur en faisant la révérence...

Enfin, au point du jour, la fille du roi rentra au Palais. Avec un soupir de soulagement, tout le monde retourna à ses besognes.

Le Roi Dragon posa un regard sévère sur sa fille.
- Petite sotte! lui dit-il. Comment oses-tu violer les règlements du Palais et sortir en cachette! Où es-tu allée?

Son père était rouge de colère, la fillette préfèra avouer tout de suite:
- Mon roi et cher père, ne vous fâchez pas, je suis allée admirer les lanternes en forme de poissons. Si Bodhisattva n'avait pas envoyé un jeune novice pour me sauver, je ne serais plus de ce monde!

PARTIE V

A l'idée qu'il avait risqué de perdre sa fille chérie, le roi s'attendrit. Puis une autre idée le traversa, qui prit le dessus:
"Si Bodhisattva allait rapporter cette histoire à l'Empereur Céleste de Jade, il allait se faire taper sur les doigts pour ne pas avoir élevé sa fille avec plus de sévérité."

Cette inquiétude lui fit monter la moutarde au nez, il se fâcha tout rouge et chassa sa petite fille hors du Palais.

Celle-ci ne s'attendait pas à une si sévère punition. Qu'allait-elle donc faire, où irait-elle dans cette mer immense? Eplorée, elle quitta le Palais.

Le lendemain, elle arriva, toujours en larmes, à la mer des Fleurs de lotus. La Déesse Bodhisattva, qui se trouvait dans le bosquet de bambous, entendit les sanglots et reconnut la fille du Roi Dragon. Elle envoya donc Sudhana à sa rencontre. Celui-ci courut au-devant de la fillette, l'air malicieux:
- Petite soeur, ne me reconnais-tu donc pas? Le petit bonze, c'est moi.

La fillette se hâta d'essuyer ses larmes et dit, le visage en feu:
- Es-tu frère Sudhana? Tu m'as sauvé la vie!

Elle allait se prosterner, mais sudhana la prit par la main et dit:
- Suis-moi, Bodhisattva qui t'attend m'a envoyé t'accueillir.

La main dans la main, ils entrèrent dans le bosquet de bambous. A la vue de la Déesse majestueusement assise sur son trône de fleurs de lotus, la jeune fille se prosterna le front contre terre.

Bodhisattva qui l'aimait bien, lui dit qu'elle pouvait rester avec eux et partager avec frère Sudhana la grotte de bruits des marées. Celle-ci passa à la légende sous le nom de "grotte de Sudhana et de la fille Dragon."

Depuis lors, la fille du Roi Dragon vécut auprès de la Déesse Bodhisattva. Le roi son père qui avait regretté sa colère vint souvent la supplier de rentrer.

Mais son coeur s'était désormais attaché au paysage du mont du Pèlerinage bouddhique, si bien qu'elle ne désirait plus retourner dans le Palais sous la mer.
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MessageSujet: Re: Légendes de 11 à 20   Légendes de 11 à 20 Icon_minitime2/2/2007, 09:57

Dragon du Feu de la Terre et des Eaux


PARTIE I

Il y a bien longtemps, dit-on, le Dragon s'occupait spécialement du feu des fourneaux de la Reine Mère au Palais céleste. Quand on avait besoin de flammes pour de la cuisine, le Dragon soufflait sur les feux de toutes ses forces; et après, pour simplement entretenir le feu, il fermait d'un coup l'âtre à moitié. Chaque jour il devait accomplir ce travail simple et monotone.

Avec le temps, trouvant cela ennuyeux, il se mit à souffler sur le feu, et à fermer l'âtre avec moins d'intérêt et d'assiduité, si bien que parfois le feu s'éteignait ou que les plats n'étaient pas assez cuits. La Reine Mère s'en prit plusieurs fois à tort au cuisinier.

Un jour, la Reine Mère voulut manger de la viande de mouton rôtie. Comme les flammes n'étaient pas assez fortes, la viande, pas assez rôtie, avait une odeur désagréable. Son estomac étant fragile, la Reine Mère vomit longtemps. Très fâchée, elle jeta le morceau de viande, dont elle n'avait mangé qu'une bouchée, dans le fourneau si violemment que des étincelles jaillirent dans tous les sens.

Puis elle prit le tisonnier et abattit sur la tête du Dragon une série de coups, tout en criant:
- Le plus grand paresseux du monde! Tu ne peux même pas accomplir correctement cette petite tâche, que pourrais-tu faire d'autre? Il va falloir t'arracher ta peau de cinq couleurs et étirer tes muscles paresseux!

Sous la douleur causée par les coups, le Dragon fit le dos rond; longtemps après, il répliqua:
- Reine Mère, Reine Mère, je sais qu'un grand morceau de bois peut être utilisé comme poutre, mais on n'a jamais entendu dire qu'on pouvait s'en servir comme d'une canne! Moi qui ai de si grands talents, pourquoi m'occuper seulement au feu des fourneaux, au lieu d'accomplir quelqu'autre grande mission?

Bien qu'elle fronçât comme toujours les sourcils et poussât quelques "hum" avec son nez, la Reine Mère réfléchit un peu et trouva que les paroles du Dragon n'étaient pas dépourvues de bon sens, elle se contint et dit alors au Dragon:
- Bon, bon, puisque tu ne veux pas t'occuper de mes fourneaux, descends alors dans le monde, les champs y sont accidentés, et il s'y produit souvent des cataclysmes. Il faut faire quelque chose. Va t'en occuper. Cependant tu dois savoir qu'il n'y a là-bas que deux grandes affaires: L'eau et le sol, qui regardent la vie de tous les êtres du bas monde. Ne travaille pas négligemment!

- Je le sais, je le sais, acquiesça le Dragon avec des signes de tête. Soyez tranquille.

Enchanté de quitter si vite les fourneaux et d'aller accomplir une grande mission, il s'envola vers le monde.

PARTIE II

Là-bas, il vit les cimes ondulées des montagnes, et à plusieurs endroits, de la fumée et de la poussière, il entendit de vagues bruits de tremblement de terre. Il allongea le nez, incommodé par ces grondements désagréables et ces odeurs de fumée et de poussière. Mais à l'idée du tisonnier cruel de la Reine Mère, il se contraignit à replacer avec sa queue les morceaux de terre et de roches écroulés, et à combler les fentes du sol.

Au bout d'une seule journée, il était fatigué et à bout de souffle. Il maugréa dans son coeur:
"Peuh! Reine Mère, que vos deux yeux s'aveuglent! Quelle grande mission? Vous me changez seulement de fourneau. Avec mes talents, ne puis-je pas m'occuper d'autre chose que de ce feu de fourneau, de ces fumées et de cette poussière, de ces morceaux de terre et de roches?"

Irrité de la méchanceté de la Reine Mère, il s'endormit, cela dura on ne sait combien de temps.

Un jour, un grand accident arriva: Une grande partie du mont Taishan, qui soutient le coin nord-est du ciel s'écroula, le ciel en fut tout agité et la terre bouleversée, même le Palais céleste de la Reine Mère trembla, si fort qu'elle tomba de son lit de jade. Elle frotta un peu ses yeux ensommeillés, et sans avoir besoin de rien demander, elle devina à peu près ce qui s'était passé. Elle envoya immédiatement l'immortel Erlang chercher le Dragon sur la terre. A sa vue, elle gronda en pointant le bout de son nez:
- Quelle bêtise, quelle bêtise! Comment, as-tu autant dormi? Tu as bel et bien remué le ciel et la terre!

La tête rentrée de peur, le Dragon expliqua en grimaçant un sourire:
- Reine Mère, je vous prie d'apaiser votre colère, puisque dans votre sagesse vous savez reconnaître les grands talents, vous devriez également très bien savoir les évaluer et les utiliser. Par exemple moi, avec mes grands talents, au lieu de la terre, il me convient d'administrer les eaux. Si vous m'envoyez m'occuper de la mer immense et surveiller les inondations, peut-être pourrais-je vite réussir dans ces tâches.

Ne sachant trop que penser, la Reine Mère hésita un instant, puis elle dit:
- Eh bien, eh bien, va alors administrer les eaux!

PARTIE III

Le Dragon arriva en volant à l'immense mer tumultueuse. Il fut très content de trouver enfin un endroit où il pourrait faire preuve de ses capacités.

Comme une flèche, il se tournait et se retournait avec enthousiasme sur les vagues pour les apaiser. Ah! Quelle mission grandiose! Pourtant son ardeur ne dura pas et au bout d'une quinzaine de jours, il commença à s'ennuyer. Il pensait:
"La mer n'est qu'un grand fourneau, et les vagues , les flammes. Ce que je fais, c'est toujours de souffler sur le feu et de fermer l'âtre. Pourquoi n'ai-je pas d'autre grande mission à accomplir?"

Plus il réfléchissait, plus il était dégoûté. D'un coup, il plongea au fond de la mer. Il y vit de belles choses multicolores, tous les poissons vinrent se mettre à son service. Il pouvait se nourrir à son aise.

Plus tard, il se nomma Roi Dragon des eaux et ordonna aux poissons de construire pour lui un Palais magnifique. Depuis lors, il y habita, toujours ivre, sans se soucier ni de la faim, ni du froid, et sans distinguer non plus les nuits des jours.

Pendant ce temps sur la terre, des inondations se produisaient chaque année, l'eau de mer montait sans cesse, inondant les plaines, les montagnes, et pour finir parvint à la Porte sud du Palais céleste. La Reine Mère, qui était en train d'admirer le paysage, fut frappée par de hautes vagues, et ses précieuses chaussures brodées de fleurs furent mouillées. Ne pouvant retenir sa colère, elle murmura:
- Pendard! Il a laissé les vagues agitées monter jusqu'à la Porte sud du Palais!

L'immortel Erlang fut envoyé dans le monde. Peu de temps après, il rentra et rapporta:
- Reine Mère, catastrophe! L'eau de la mer s'est mélangée avec le ciel! Et ce Dragon des eaux est allongé dans son Palais jouant avec ses beautés.

PARTIE IV

La Reine Mère fut tellement indignée qu'elle en oublia de faire minutieusement ses chignons en forme de nuages. Elle ordonna immédiatement à l'armée céleste d'aller arrêter le Dragon des eaux. Ligoté comme un ballot, celui-ci fut apporté chez la Reine Mère; à peine eut-il présenté ses excuses que la Reine Mère le réprimanda d'un signe de la main:
- Hum, hum! Tais-toi! Tais-toi! Je vais te mettre d'abord dans le fourneau trois jours et trois nuits, puis dans la glacière trois jours et trois nuits, pour t'éclaircir un peu les idées...

Six jours plus tard, les écailles du Dragon étaient brûlées par les flammes et son menton s'allongea à cause du froid. Il supplia en tremblant:
- Reine Mère, excusez-moi, je vous prie de me faire grâce, je veux racheter mon crime par des services méritoires.

- Eh bien, je te fais grâce de la vie, dit la Reine Mère. Mais cette fois, je vais te mettre entre le ciel et la terre, pour que tu t'occupes des nuages et des pluies; plus concrètement, tu administreras spécialement les beaux jours et la tombée des pluies.
Quand les beaux jours auront duré assez longtemps , tu devras faire tomber la pluie, et après une longue pluie, tu devras donner à nouveau les beaux jours. C'est une tâche importante et minutieuse, mais si tu t'y montres encore paresseux, la loi céleste ne te pardonnera plus!

- Je sais, je sais, répéta le Dragon.

Comme elle ne faisait pas grande confiance au Dragon, la Reine Mère envoya cette fois le dieu du Tonnerre, au caractère irascible, le surveiller. Quand il y avait des nuages noirs, le dieu du Tonnerre battait le tambour avec des bâtons pour presser le Dragon de faire tomber la pluie, et lorsque la pluie tombait depuis longtemps, il battait le tambour pour lui rappeler d'arrêter la pluie.

On dit que depuis lors, le tonnerre gronde habituellement quand il pleut. Et le Dragon s'est habitué à rassembler les nuages et à faire tomber les pluies sous la surveillance et la menace des bâtons du dieu du Tonnerre.
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